Contravention Ahmed Z. est verbalisé sur une bretelle à l?est d?Alger. Il détruit les reçus. Le motard ramasse les morceaux et... Brahim Kharabi, le bon vieux président du tribunal d?El-Harrach, a ceci de particulier, et il est bon de le signaler pour l?objectivité de cette chronique, que lorsqu?il a devant lui un agent de police victime d?un quelconque délit, il l?avertit d?être équitable dans ses analyses, rigoureux lors de la déposition, mais juste. L?immense motard qui avait verbalisé Ahmed Z. pour une infraction au code de la route, a été pris de court lorsqu?il a débuté son témoignage sur la seconde infraction commise, à savoir la destruction du papillon-PV, il avait été impressionné par la nombreuse assistance de la salle d?audience, d?autant plus que le terrible président avait prévenu qu?il prendrait acte des faits tels qu?ils se sont déroulés : sans être grossis ni déformés. Le motard explique que, selon lui, il devait effectuer normalement son boulot en dressant un PV : «Mais là où j?ai été touché dans mon amour-propre, c?est lorsque j?ai ramassé les morceaux du reçu où était le sceau de l?État. Il avait porté atteinte aux valeurs de la République», dit-il avant d?ajouter que le «verbalisé» avait détruit le papillon sciemment au nez et à la barbe des automobilistes qui attendaient le contrôle. L?inculpé était mal parti ! Puis il raconte que deux jours plus tard, Ahmed repassa sur le même tronçon. «J?étais toujours là en service. Lorsqu?il m?a vu, ses traits ont changé. Il a compris ce qu?il avait fait. Et moi je savais ce qu?il me restait à faire», conclut fièrement le policier qui a eu tout de même le mérite de ne pas en rajouter et d?accabler l?automobiliste. Me Houcine Bouchina, l?avocat de l?inculpé, a de suite une idée sur la suite des débats, surtout lorsque le juge avait demandé à la victime s?il y avait eu des insultes, un manquement de respect ou des menaces. La réponse est non, non et non. Ahmed donne sa version, bancale, mais acceptable. Il assure que le reçu a pris les «airs» au moment où il avait baissé la vitre : «Ce jour-là, il y avait du vent ce qui était bizarre pour un mois d?août», avait-il précisé. Mahfoudi, mademoiselle le procureur, demande l?application de la loi. Demande à double tranchant. C?est-à-dire que le verdict reste du bon vouloir du juge qui avait maîtrisé les débats. L?avocat plaide à l?aise. Il le fait en gros, en détail, en couleur même, poussant la coquetterie jusqu?à annoncer le doute dans la version du représentant de la loi. Et il a tant désiré que ce même doute envahisse l?esprit du juge. Il appuie sur la pédale : «Franchement M. le président, entre l?inculpation et les propos tenus aujourd?hui, il n?y a pas de quoi fouetter un chat. Que fait donc mon client ici ? Il a détruit un papillon de PV et alors ? Il y a le double. Le motard vous a informé qu?il a trouvé le petit papier sur la chaussée. Est-ce un délit ? Mon client vous a clairement dit que le vent avait emporté le reçu qui aurait pu être ramassé par quelqu?un qui l?aurait déchiré par superstition !!! Donc, la relaxe est le seul verdict», siffle l?avocat qui apprend que le juge a suivi sa demande. Ouf.