Contrairement à ce qu'affirme Washington, la situation à Kaboul reste explosive. Les élections n'auront peut-être pas lieu en octobre. L'approche de l'élection présidentielle américaine, en novembre, George W. Bush paraît décidé à repeindre le monde en rose... y compris les montagnes de l'Afghanistan ! Alors qu'il recevait à Washington, le 15 juin, Hamid Karzaï, le président afghan, Bush n'a pas hésité à voir dans ce pays un modèle pour l'Irak. A Kaboul, la capitale, ceux qui disposent d'électricité et peuvent écouter les nouvelles en rient encore, sans doute. Car les occasions de plaisanter sont plutôt rares. Il semble inévitable que l?élection présidentielle prévue en octobre prochain soit à nouveau retardée. C'est un coup dur pour Washington. A moins de deux mois du scrutin aux Etats-Unis, l'administration américaine espérait prendre à témoin le reste du monde, par caméras de télévision interposées : «Le calme est de retour dans l'ancienne place forte des talibans et de leurs alliés d'Al-Qaîda. La preuve, les Afghans votent pour la première fois de leur vie !» L'ennui, c'est que rien n'est prêt. Et la situation est explosive. La liste des problèmes est sans fin. Retenons l'essentiel. Primo, les seigneurs de la guerre et les chefs de tribu refusent de dissoudre leurs milices privées (100 000 hommes armés). Secundo, les pays membres de l'Otan n'ont toujours pas fourni les troupes et le matériel promis afin d'assurer un minimum de sécurité pendant la consultation. Tertio, Oussama Ben Laden prouve régulièrement, par le biais de ses messages enregistrés, qu'il est bel et bien vivant. Ses alliés talibans contrôleraient la province de Zaboul, à la frontière avec le Pakistan, dans sa totalité ou presque. Dernière mauvaise nouvelle : la culture du pavot, interrompue autrefois sous les talibans, a repris de plus belle et la récolte de cette année devrait battre tous les records. En 2003, déjà, l'Afghanistan avait fourni 75% de l'héroïne consommée dans le monde. La sécurité, surtout, n'est pas au rendez-vous. Après les meurtres de cinq membres de Médecins sans frontières, au début de juin, de nombreuses ONG présentes sur le terrain ont décidé de rapatrier leurs volontaires.