Activité Bien qu?ils activent à Oran depuis plusieurs années, personne ne semble connaître le nombre exact des taxis clandestins qui, faut-il le reconnaître, rendent souvent service à la ménagère encombrée. Reconnaissables aux longues files qu?ils forment, principalement aux stations de taxis désertées par les taxis légaux, les clandestins trônent en maîtres sans que les autorités locales trouvent à redire. A M?dina J?dida par exemple, c?est devant les policiers en faction que ces «clandos» attendent les éventuels clients, indifférents aux regards courroucés, mais désormais désillusionnés des chauffeurs de taxis réglementaires : «Ce qui me scandalise le plus, confie un jeune chauffeur, c?est que beaucoup d?entre eux sont fonctionnaires, employés dans des entreprises privées ou touchent une retraite. Ce qui ne les empêche pas de vouloir à tout prix arrondir leurs fins de mois.» A n?en pas douter, les taxis clandestins accaparent une part de marché non négligeable et leurs recettes journalières avoisinent souvent les 2 000 DA, évidemment nets d?impôts. Une course de dix minutes environ, à partir de Tahtaha de M?dina J?dida jusqu?au boulevard Front de mer, qui coûterait 40 ou 45 DA en taxi réglementaire, revient à 100 DA en clandestin. Sauf qu?avec le clandestin, l?on est sûr de voyager seul alors qu?avec les taxis réglementaires, la double, triple voire quadruple course est toujours de mise. Ce qui génère quelquefois des situations embarrassantes pour les usagers qui se retrouvent serrés à trois sur la banquette arrière d?une petite voiture style Clio ou Renault 5. Jadis très prudents dans leur «travail», la police n?étant pas très indulgente, les clandestins opèrent maintenant en toute impunité, dans la quiétude la plus absolue. Pratiquement toutes les places et esplanades de la ville, les principales avenues et les principaux boulevards sont squattés ; même l?intérieur du CHU n?y échappe pas. Avec les années de braise et la décrépitude de la profession de chauffeur de taxi, certains clandestins se sont même assuré la fidélité d?une catégorie de clients qui peut se montrer très prodigue : les entraîneuses de cabarets qui, particulièrement en été, sont souvent de sortie. «Je travaille, confirme Kamel, un clandestin stationnant à proximité de l?hôtel Adef, avec deux ou trois filles habitant assez loin du centre-ville. Et je dois dire que, outre le tarif de la course (300 DA), il leur arrive parfois de me gratifier de 1 000 DA de pourboire.» Cette activité n?est cependant pas sans risques et nombre de ces clandestins se sont fait agresser à la sortie des hôtels, cabarets ou boîtes de nuit. Le même Kamel raconte avoir été braqué par deux truands alors qu?il s?apprêtait à reconduire une entraîneuse chez elle. Résultat, depuis cette nuit-là «où j?ai été soulagé de tout ce que je possédais, sans, fort heureusement, subir de préjudice physique, je ne circule jamais sans ce compagnon», conclut-il, en brandissant un gourdin de taille impressionnante.