Redez-vous ■ Le pays vit la campagne pour la première élection présidentielle de l'après-révolution, pour laquelle l'ex-Premier ministre Béji Caïd Essebsi, 87 ans, part favori après la victoire de son parti anti-islamiste Nidaa Tounès aux législatives. Vingt-sept candidats sont en lice pour le scrutin du 23 novembre. Parmi eux figurent le président sortant Moncef Marzouki, une femme -la magistrate Kalthoum Kannou- ainsi que d'anciens ministres de l'ex-président Zine El Abidine Ben Ali. Un deuxième tour aura lieu fin décembre si aucun des candidats ne remporte la majorité absolue des suffrages au premier tour. De son indépendance en 1956 jusqu'à la révolution, la Tunisie n'a connu que deux présidents: Habib Bourguiba, le «père de l'indépendance» déposé le 7 novembre 1987 par un coup d'Etat de son Premier ministre, Ben Ali, et ce dernier, qui occupa le Palais de Carthage jusqu'à sa fuite en Arabie saoudite le 14 janvier 2011. Afin d'éviter une nouvelle dictature, le futur chef de l'Etat ne disposera, selon la Constitution adoptée en janvier dernier, que de pouvoirs restreints, l'essentiel de l'exécutif relevant du Premier ministre issu de la majorité parlementaire. Malgré son grand âge, Béji Caïd Essebsi part favori. Ministre de l'Intérieur, de la Défense et des Affaires étrangères sous Bourguiba, puis président du Parlement en 1990-1991 sous Ben Ali, ce communicant difficile à intimider a promis de restaurer le «prestige» de l'Etat. Si ses partisans le voient comme le seul à pouvoir «faire barrage» aux islamistes, ses opposants l'accusent d'être un produit du sérail cherchant à rétablir l'ancien régime, et d'être aux antipodes d'une révolution conduite par la jeunesse. Parmi les autres candidats en lice figurent le président de l'Assemblée constituante, Mustapha Ben Jaafar, et le richissime homme d'affaires et président du Club africain, une équipe de football, Slim Riahi. M. Ben Jaafar a lancé un appel aux partis «socio-démocrates» pour qu'ils se mettent d'accord sur un candidat unique, dans l'espoir que la présidence échappe à Nidaa Tounès. Pour cette élection présidentielle, Ennahda, qui a longtemps combattu le principe même d'une présidentielle au suffrage universel, n'a pas présenté de candidat. Le parti n'a pas annoncé dans l'immédiat soutenir l'un ou l'autre des concurrents. Malgré l'instabilité qui a suivi la révolution, la Tunisie fait figure de dernier espoir pour instaurer un régime démocratique dans l'un des pays du Printemps arabe. Mais elle fait toujours face à d'importants défis, au premier rang desquels l'essor d'une mouvance jihadiste armée responsable de la mort de dizaines de policiers et militaires et de l'assassinat de deux figures politiques anti-islamistes. La stabilité de la Tunisie est aussi minée par une économie anémique et un chômage endémique touchant particulièrement les jeunes diplômés.