Résumé de la 76e partie ■ Claire raconte son passé au père Gourny, elle lui parle entre autre de son travail chez l'abbé Plançon. Quand, sortant de la sacristie, l'abbé Plançon s'était dirigé vers l'autel, il avait découvert sa nouvelle bonne agenouillée, les mains jointes, en train de prier. En entendant arriver le prêtre elle s'était levée en même temps que les autres paroissiens présents. L'assistance était des plus clairsemées, comme d'ordinaire à cette heure matinale. On retrouvait en fait toujours les mêmes fidèles : Amélie, la boiteuse, qui depuis plus de vingt ans se chargeait de l'entretien de l'église ; mademoiselle Picard, l'ancienne infirmière qui rendait encore des services en faisant des piqûres, et dont on disait qu'elle connaissait mieux les fesses des habitants de Saint-Firmin que leurs visages ; madame Pelletier, enfin, la veuve du notaire, qui tenait l'harmonium les dimanches et jours de fête et dirigeait la chorale de jeunes filles. C'était elle également qui se chargeait chaque année de l'organisation de la vente de charité. Les mauvaises langues chuchotaient que tant de pieuses actions n'étaient dictées que par une dévotion très païenne pour la belle prestance du curé... Pendant qu'il disait la messe, ce matin-là, l'abbé Plançon s'était d'ailleurs demandé si madame Pelletier n'était pas déjà en train de dévisager d'une curieuse manière sa nouvelle bonne. Il fallait reconnaître qu'elle avait trente ans de moins qu'Ambroisine, et était beaucoup plus charmante que la plupart des servantes de curé. La veuve du notaire devait, à n'en pas douter, penser qu'il s'agissait là non pas d'un Agneau de Dieu, mais d'une envoyée de Satan ! Elle n'avait peut-être pas tout à fait tort... Quand il eut prononcé l'Ite missa est, le prêtre avait vu les yeux de Claire se lever vers lui et il avait tressailli sous la force de son regard sombre. Quel pouvoir possédaient donc ces yeux pour qu'il en ressentît un tel trouble ? Il avait alors soudain réalisé que la femme avait des yeux de pécheresse. La chambre d'hôtel était sordide. Dans le lit, aux draps d'une propreté douteuse, il y avait un couple. L'homme dormait profondément. La femme, les yeux grands ouverts, fixait le plafond d'un regard vide. Elle frissonna de dégoût quand, dans un grincement de ressorts, son compagnon de hasard se retourna et la toucha bestialement sans même se réveiller. Elle se leva rapidement, s'habilla, tira de la veste du client, posée sur un dossier de chaise, le portefeuille qu'elle vida puis elle s'enfuit de la chambre sans même jeter un regard sur l'homme toujours endormi. Une fois dans les rues de Marseille, elle marcha jusqu'au modeste logement qu'elle occupait dans le quartier du Panier. Comme d'habitude, elle commença par se doucher pour effacer les souillures de la nuit. Une nausée l'envahit quand elle repensa à son dernier client, une vraie brute dont les vêtements et même la peau étaient imprégnés d'une tenace odeur de poisson. A suivre