Le maître d'école, l'enseignant en général, n'a plus le lustre d'antan mais il garde encore une place dans la société : après tout, il est celui qui dispense le savoir. Le terme le plus courant pour le désigner est chikh, que l'on traduit souvent par «maître», bien que le mot soit en français, cheikh, il est vrai avec d?autres sens (vieillard, notable arabe, chef religieux). Le cheikh scolaire, le chikh des élèves, est avant tout un titre honorifique duquel on a évacué le sens traditionnel de «vieillard» pour celui de «honorable». L'expression chikh-na (notre maître) a une tonalité affective très forte : c'est l'élève qui évoque un maître qu'il aime et qu'il respecte, c'est l?adulte qui exprime sa reconnaissance à celui qui lui a ouvert les portes du savoir... Autrefois ? et encore aujourd'hui, dans certaines régions ? on dit aussi sidi (mon seigneur) au maître d'école, autre titre honorifique réservé aux saints et aux grands seigneurs. A cause de ce dernier emploi sans doute, certains enseignants interdisaient à leurs élèves l?utilisation de ce mot. Ils leur recommandaient l'emploi du classique, plus neutre, ustad, c'est-à-dire «maître» avec un sens moderne de «professeur». Ce terme est devenu commun dans les collèges, les lycées et à l'université et on a même tendance à l'employer dans les écoles primaires. D'ailleurs, le terme a l'avantage de posséder un féminin, ustada, ce qui n'est pas le cas de chikh et sidi, remplacés par anissati, au propre «mademoiselle» mais employé aussi au sens de «madame». On a pris l'habitude, dès le primaire, de s'adresser aux enseignants de français en employant les termes français «monsieur» (prononcé m'sieur, msyu, etc.) et «madame» et parfois, quand l'enseignante l'impose, «mademoiselle» (prononcé madmazil et mamazel). Ces deux mots ont acquis, outre leur fonction de termes d'adresse, le sens d'«enseignant» et «enseignante», spécialement de français : «Qalenna m'sieur» (le professeur nous a dit), «Ma djat-ch madam», (l'enseignante de français n'est pas venue), etc...