InfoSoir : Facebook paraît plus qu'un réseau social, il est un outil de communication, un mode d'expression. Ammar Kessab : Tout à fait. Facebook s'est imposé depuis quelques années comme le moyen de communication le plus puissant et le plus accessible. Il a devancé de loin, par sa facilité d'accès et par le nombre de ses abonnés, les médias classiques de communication. Il est devenu aujourd'hui incontournable pour des millions d'utilisateurs à travers le monde pour communiquer avec d'autres personnes, mais aussi pour exprimer leurs opinions politiques et sur des sujets qui les concernent. Ce qui est extraordinaire, c'est qu'il rapproche les gens, les sociétés et les cultures. Le nombre d'utilisateurs de facebook avoisine les 1.5 milliard issus de l'ensemble des pays du globe. Les interactions entre les sociétés sont forcément très denses. Ainsi, des ponts culturels se construisent entre les différentes cultures. En Algérie, on estime à 8 millions le nombre d'utilisateurs de ce réseau. Des liens ont été tissés entre les différents citoyens, et quand les idées et les opinions convergent, des mouvements sont créés, virtuellement, mais qui peuvent se transformer aussi en une action sur le terrain. Justement, il s'impose comme une plateforme où convergent les idées et les opinions. Toutes les polémiques qui écalent ici et là sont automatiquement discutées sur facebook. Ainsi, les idées convergent mais il y a aussi des divergences. Les guerres se mènent, se gagnent ou se perdent aussi sur facebook. Dernièrement, la polémique sur l'article de Kamel Daoud dans lequel il parle des réfugiés syriens a suscité un débat passionné sur le réseau social. Toutes les opinions ont été exposées. Des pages spéciales ont été créées pour soutenir ou pour dénoncer l'article de Kamel Daoud. Et il est aussi une tribune sur laquelle s'élèvent des voix pour se faire entendre. Les évènements du printemps arabe ont prouvé que facebook est devenu un moyen de mobilisation extraordinaire. En Egypte, on se rappelle comment les premières manifestations contre le régime ont drainé des dizaines de milliers d'Egyptiens dans la rue. Les vidéos et les messages se répandent dans le réseau social comme une traînée de poudre. C'est dire qu'il est un lieu de dénonciation et de contestation. Oui. Les gens trouvent plus de liberté de contester sur un espace virtuel que dans la rue, surtout en Algérie où le régime interdit toute manifestation, même pacifique. Donc les Algériens se réfugient dans le virtuel pour dire, dénoncer, contester, accuser. Cela dit enfin que facebook s'impose comme un pouvoir, voire un contre-pouvoir. C'est un pouvoir en soi. Je discutais il y a quelque temps avec un ami sénégalais qui m'a expliqué que désormais, grâce à facebook, aucun candidat politique ne peut tricher dans les élections, car dans chaque bureau de vote, il y a des jeunes qui relèvent en temps réel ce qu'ils voient, et au moindre soupçon, tout le monde converge dans le lieu. C'est un outil qui aide la démocratie à se répandre. Y. I. * Expert en politiques culturelles