C?est dans la soirée du 30 août 2004. Peu avant minuit, Bahia ressent les premières contractions de l?accouchement et perd ses eaux. Fatah, son mari, est contraint de l?emmener immédiatement à l?hôpital Parnet. - 00h : Ils arrivent à l?hôpital de Parnet. La femme s?installe seule dans la salle d?attente alors que son mari l?attend dehors, car les agents de sécurité lui interdisent d?entrer avec sa femme. C?est le règlement. - 1h 30 : La sage-femme arrive enfin. Elle ausculte Bahia et lui affirme que le bébé se présente mal et que le médecin devrait descendre l'examiner. - 2h 30 : Le médecin arrive, c?est une femme. Elle confirme les déclarations de la sage-femme et exige que celle-ci fasse une radio. Fatah emmène sa femme, difficilement, jusqu?au service de radiologie. - 2h 45 : Après avoir vu la radio, le médecin rassure le mari et lui explique que sa femme sera tout de suite prise en charge. Elle explique ensuite aux trois autres patientes, accompagnées de leur mari, dont un Malien marié à une Algérienne, qu?elle ne peut les prendre en charge et qu?ils doivent partir vers un autre hôpital. «Le service est complet», martèle-t-elle. Le Malien refuse de partir et fait intervenir ses collègues de l?ambassade. Quelque temps plus tard, il revient avec des attachés militaires et des policiers. «Pour éviter un incident diplomatique», le médecin accepte de le prendre en charge et renvoie Bahia vers l?hôpital de Kouba. - Durant une heure, le mari tente de convaincre le médecin d?accepter de faire accoucher sa femme puisque son cas est le plus grave d?entre les quatre femmes présentes. En vain. - 3h 30 : Fatah va voir le surveillant de garde. Celui-ci tente de parler au maître-assistant pour faire admettre la malade, mais rien. «Mon ami, je ne peux rien pour vous. Je ne peux que présenter un rapport. Elle ne veut rien entendre.» - 4h : Fatah tente de faire intervenir le policier, celui-ci lui explique qu?il ne peut rien faire, car c?est le médecin qui est maître à l?hôpital, il se dirige au commissariat pour porter plainte contre le service de maternité pour «non-assistance à personne en danger». «Je ne pouvais rien faire. Je voyais ma femme mourir, je voulais dégager ma responsabilité.» - 4h 10 : «Prends-moi d?ici, emmène-moi ailleurs», crie la femme de Fatah. Il l?emmène à l?hôpital de Kouba. - 4h 30 : Bahia est admise au service de maternité. - 5h 30 : elle accouche et l?on annonce la nouvelle à Fatah qui court à la maison pour ramener des vêtements de rechange à sa femme. - 8h 30 : lorsqu?il revient, les infirmiers lui annoncent que sa femme est décédée ; le bébé a été sauvé.