Conflit n Le régime syrien est sur le point de remporter une victoire majeure en reprenant la totalité d'Alep, la deuxième ville du pays. «Nous vivons les derniers moments avant la victoire», a confié un responsable militaire à Alep, où des tirs de joie l'avaient déjà célébrée hier soir dans les quartiers gouvernementaux, selon des témoins. Mais les ravages des combats préoccupent fortement l'ONU, dont le secrétaire général Ban Ki-moon s'est alarmé d'informations faisant état d'atrocités «contre un grand nombre» de civils. «C'est l'enfer», a résumé l'organisation des secouristes des Casques Blancs, qui opère dans les quartiers de la rébellion. La télévision d'Etat syrienne a diffusé ce mardi des images filmées dans les quartiers repris aux rebelles : un même paysage de désolation, de ruines et de gravats à perte de vue sous une pluie fine. Quittant cette zone, plusieurs centaines de civils formaient une file sans fin et avançaient à petits pas, certains emmitouflés dans des couvertures ou des manteaux, portant leurs enfants en bas âge et leurs maigres possessions dans des sacs en plastique. L'armée syrienne et les forces étrangères qui la soutiennent contrôlent plus de 90% d'Alep-Est. Elles y menaient ce mardi matin des opérations de ratissage. Les insurgés ne tiennent plus aujourd'hui qu'un territoire limité, dont le quartier d'Al-Machad et quelques pans du district de Soukkari. Soit un territoire «pas supérieur à 3km2», selon un communiqué russe. La reprise totale d'Alep, divisée depuis 2012, va permettre au régime de Bachar al-Assad de contrôler les cinq plus grandes villes de Syrie, avec Homs, Hama, Damas et Lattaquié. Un revirement qui n'aurait pas été possible sans le précieux soutien de Moscou, allié indéfectible de Damas. Engagée en Syrie depuis septembre 2015, l'armée russe a ainsi mené quatre semaines de bombardements particulièrement meurtriers et destructeurs sur Alep, qui ont préparé le terrain à cette victoire du régime. Les bombardements du régime se sont poursuivis dans la nuit avant de baisser en intensité au lever du jour, alors qu'un épais brouillard s'installait sur Alep ce mardi matin. Dans le quartier d'Al-Machad, de nombreux civils s'entassaient dans un même secteur faute d'abris, selon des témoins. Des femmes et des enfants dormaient dans la rue adossés à leurs valises. Les gens ont faim et sont à la recherche de pain. Le Comité international de la Croix-rouge (CICR) a appelé ce matin toutes les parties à «épargner les vies humaines» à Alep. «Les vies de milliers de civils sont en danger, alors qu'ils sont pris au piège par les lignes de front», a-t-il précisé. «Alors que la bataille atteint de nouveaux sommets et que la zone sombre dans le chaos, des milliers qui ne participent pas aux violences n'ont nul refuge où aller», met en garde le CICR. «C'est peut-être notre dernière chance de sauver des vies». Cette forte inquiétude est partagée par Ban Ki-moon. «Les Nations unies soulignent l'obligation pour toutes les parties sur le terrain de protéger les civils en se conformant aux règles humanitaires internationales», selon son porte-parole, Stéphane Dujarric. Les insurgés d'Alep ont commencé à céder du terrain lorsque l'armée, soutenue par des combattants iraniens et du Hezbollah libanais, a lancé une campagne foudroyante, le 15 novembre, pour reprendre la partie orientale qui lui échappait depuis juillet 2012.