Résumé de la 9e partie n «Percinet, s'écriait-elle où êtes-vous ? Est-il possible que vous m'ayez abandonnée ?» Comme elle disait ces mots, elle vit tout d'un coup la plus belle et la plus surprenante chose du monde. Dans ce moment elle entendit du bruit derrière elle : la peur la saisit, elle crut que c'était quelque bête féroce qui l'allait dévorer. Elle regarda en tremblant, et elle vit le prince Percinet aussi beau que l'on dépeint l'amour. — Vous me fuyez, lui dit-il, ma princesse ; vous me craignez quand je vous adore. Est-il possible que vous soyez si peu instruite de mon respect, et de me croire capable d'en manquer pour vous ? Venez, venez sans alarme dans le palais de féerie, je n'y entrerai pas si vous me le défendez ; vous y trouverez la reine ma mère, et mes sœurs, qui vous aiment déjà tendrement, sur ce que je leur ai dit de vous. Gracieuse, charmée de la manière soumise et engageante dont lui parlait son jeune amant, ne put refuser d'entrer avec lui dans un petit traîneau peint et doré, que deux cerfs tiraient d'une vitesse prodigieuse, de sorte qu'en très peu de temps il la conduisit en mille endroits de cette forêt, qui lui semblèrent admirables. On voyait clair partout ; il y avait des bergers et des bergères vêtus galamment, qui dansaient au son des flûtes et des musettes. Elle voyait en d'autres lieux, sur le bord des fontaines, des villageois avec leurs maîtresses, qui mangeaient et qui chantaient gaiement. – Je croyais, lui dit-elle, cette forêt inhabitée, mais tout m'y paraît peuplé et dans la joie. –Depuis que vous y êtes, ma princesse, répliqua Percinet, il n'y a plus dans cette sombre solitude que des plaisirs et d'agréables amusements : les amours vous accompagnent, les fleurs naissent sous vos pas. Gracieuse n'osa répondre ; elle ne voulait point s'embarquer dans ces sortes de conversations, et elle pria le prince de la mener auprès de la reine sa mère. Aussitôt il dit à ses cerfs d'aller au palais de féerie. Elle entendit en arrivant une musique admirable, et la reine avec deux de ses filles, qui étaient toutes charmantes, vinrent au-devant d'elle, l'embrassèrent, et la menèrent dans une grande salle, dont les murs étaient de cristal de roche : elle y remarqua avec beaucoup d'étonnement que son histoire jusqu'à ce jour y était gravée, et même la promenade qu'elle venait de faire avec le prince dans le traîneau ; mais cela était d'un travail si fini que les Phidias et tout ce que l'ancienne Grèce nous vante n'en auraient pu approcher. – Vous avez des ouvriers bien diligents, dit Gracieuse à Percinet ; à mesure que je fais une action et un geste, je le vois gravé. A suivre Marie Catherine, comtesse d'Aulnoy