Ecriture Rachid Boudjedra vit le désert comme une relation intime, parfois charnelle. Une expérience qu?il ne vit qu?à travers les mots. La présentation de l'ouvrage de l'écrivain Rachid Boudjedra, Cinq Fragments du désert, paru aux éditions Barzakh (2001) et récemment traduit en italien, a été l?attraction du Café- littéraire organisé lundi soir à la Bibliothèque nationale du Hamma. «C?est un événement d?avoir été traduit», a déclaré l?écrivain. Et d?ajouter : «Un événement parce que c?est un double hommage, un hommage pour moi et un autre pour l?Algérie et la culture littéraire algérienne.» Fragments du désert, paru en 2001 aux éditions algériennes Barzakh en 2001, comporte cinq textes, de longs poèmes qui racontent la relation intime qu?a l?écrivain avec le désert et les sensations ressenties lors de ses nombreux séjours dans ces lieux abrupts et féeriques. «Je suis un grand voyageur, et cela depuis 25 ans», a-t-il confié. Et d?ajouter : «Le désert est pour moi un éblouissement. C?est une relation intime que j?entretiens avec le désert, une relation qu?on ne peut évoquer qu?en mots, seulement à travers l?écriture.» «Le désert, outre son aspect positif, est aussi négatif, extrêmement dur, méchant», explique-t-il, ajoutant que «d?habitude, les écrivains représentent le désert dans un style poétique, notamment folklorique. Or c?est un lieu d?horreur, de chaos, de désordre. C?est aussi une matrice de sensations : à la fois il éblouit et angoisse?» L?écrivain, Rachid Boudjedra parle de son expérience, de sa relation avec le désert ; il raconte dans un style poétique mais fragmenté ses impressions. Pirotta Serrenella, la traductrice italienne, avoue que «le texte de Rachid Boudjedra est magnifique, chargé de poésie», c?est «un périple à travers le désert par le biais des mots». «La traduction a été très difficile mais agréable», a-t-elle expliqué. Et d?ajouter : «Difficile, parce qu?il fallait maintenir la musicalité que comporte le texte de Boudjedra dans sa version initiale, préserver sa poésie, et chercher en italien les mots qui correspondent aux mots dans leur version française. On a fait de notre mieux pour réussir la traduction. Et c?était un plaisir à le traduire.» Andréa Ulvili, l?éditeur, estime que «le texte de Rachid Boudjedra est de grande qualité». «Le livre est beau. Je l?ai vécu ainsi : éclats de pensée ; soleil qui éblouit et qui nous parle ; pensées soudaines, imprévues et surtout fragmentées ; un fragment de lumière et d?ombre qui nous parle d?une nuit charnelle et d?un jour chaotique, d?un lieu et d?un non-lieu, de présence et d?absence, d?un monde terrible, chargé de néant, d?infini, qu?il est si chargé qu?il nous appelle et nous donne un sens.» Andréa Ulvili dirige la collection «Avec l?autre», une collection qui se veut une tribune pour les écrivains de différentes cultures et qui cherche à créer des liens, des habitudes, des rencontres. «La traduction permet d?aller à la rencontre des autres cultures, collaborer et de communiquer avec les autres écritures», a-t-il confié. L?éditeur propose à cet effet un partenariat dans le domaine de la traduction avec des maisons d?édition algériennes. «Je formule le v?u, à l?intention des éditeurs algériens, pour aboutir à une coopération pratique et concrète dans le domaine culturel, notamment littéraire, une coopération qui doit devenir fondamentale et à travers laquelle il est question de créer des occasions de communication», a dit Andréa Ulvili. Enfin, Jolanga Guardi, universitaire, souligne qu?«en Italie on ne connaît pas les écrivains algériens, notamment ceux qui écrivent en arabe. L?image de l?Algérie qu?on a en Italie est véhiculée par le prisme de la France, et les livres qui ont été traduits, nous les avons connus.» Et de dire : «La littérature algérienne est magnifique, dense et d?une grande envergure. Aujourd?hui, nous ?uvrons à nous intéresser de plus près à ce qui se fait dans le domaine littéraire.» Il est à noter que les livres de Rachid Boudjedra, dont une douzaine a été traduite en italien, notamment La Répudiation, L'Insolation, Topographie, L'escargot entêté et Les Funérailles, ont été traduits en 26 langues.