Autrefois, dans une vieille maison en pierre, vivait une pauvre veuve, mère de sept enfants. La malheureuse se retrouva sans aucune ressource financière, lorsque son époux décéda des suites d?une longue et terrible maladie. Elle dut affronter seule les difficultés de l?existence. Pour nourrir ses enfants, elle acceptait tous les travaux qu?on lui proposait et s?acquittait de ses tâches correctement afin de récolter quelque argent... Ses fils se chargeaient de l?aider à l?extérieur, tandis que ses filles s?occupaient du foyer. La vie était bien pénible pour cette famille nombreuse. Quand l?hiver approchait, la veuve avait peur que ses enfants ne meurent de froid. Alors, à l?aide de bouts de laine recueillis ici et là, elle se mettait à tisser, tard dans la nuit, une large couverture de laine. Par une nuit plus fraîche que de coutume, le vent soufflait à grandes rafales alors que la pauvre femme s?usait les yeux à tisser jusqu?à une heure avancée de la nuit. Ses enfants dormaient profondément, les uns accrochés aux autres, comme s?ils avaient peur de se séparer. Brusquement, la fragile porte d?entrée claqua. Apparut alors une énorme silhouette, si effrayante que la veuve recula jusqu?au mur. Horrible et repoussante, Tériel l?ogresse se tint sur le pas de la porte, fixant de son regard perçant la pauvre femme toute tremblante. Le monstre avança vers le métier à tisser et rassura la femme terrorisée : «Ne crains rien ! Laisse-moi t?aider !» Stupéfaite et effarée, la veuve ne put prononcer un seul mot. Avec un acharnement démentiel, l?ogresse se mit à tisser. La peur au ventre, la veuve pensa qu?une fois la couverture achevée, le monstre les dévorerait, elle et ses malheureux enfants. Mais le monstre n?en fit rien. Au contraire, dès qu?il eut fini de tisser une couverture, il en entama une autre et ce jusqu?à l?aube. A ce moment-là, le monstre s?arrêta et sortit en lançant à la femme : «Voilà tes enfants à l?abri du grand froid ! Rassure-toi, l?hiver prochain, je reviendrai te tisser d?autres couvertures ! » Il en fut ainsi durant sept ans. Au début de chaque saison hivernale, l?ogresse faisait irruption chez la veuve et lui tissait sept couvertures de laine. (à suivre...) (*) Extrait des Contes magiques de haute Kabylie, de Salima Aït Mohamed, 1999. Éditions Autre temps, collection Temps contés.