L?«incivisme fiscal» des Algériens prendrait des proportions alarmantes dans la mesure où les citoyens ne déclarent que des «miettes» au fisc. «Ça va bien mais ça pourrait aller mieux.» Abdelatif Benachenou, ministre des Finances, a résumé en des termes sibyllins la situation de l?économie nationale passée au scanner, hier à l?hôtel El-Aurassi, devant un parterre de spécialistes. «ça pourrait aller mieux», selon le premier argentier du pays, car l?incivisme fiscal fait partie des accrocs qui freinent la croissance. Pour lui, la décrue fiscale s?explique aujourd?hui par le fait qu?un Algérien sur deux ne s?acquitte pas de ses impôts et que 40% des contribuables «ont une fâcheuse tendance à mentionner sur les documents : rien à déclarer». De ce fait, le problème du recouvrement fiscal est toujours entier et le salut passerait incontestablement par le renforcement de la fiscalité ordinaire. M. Benachenhou lance même un appel au forum des chefs d?entreprise (FCE) de Réda Hamiani pour la publication d?un livre blanc contre l?incivisme fiscal. Le ministre laisse présager, après lecture sommaire des chiffres, qu?une révision de la politique fiscale serait la panacée, cela afin d?éviter les affres du «trop d?impôts tue l?impôt». En effet, une forte imposition pousse, selon bon nombre d?analystes, les citoyens à ne déclarer que des miettes au fisc, ce qui aura des répercussions négatives sur les grands équilibres financiers, puisque 40% de mauvais payeurs équivaut à 40% de manque à gagner en ressources financières pour l?Etat. Et c?est pour tenter de parer au plus pressé que l?administration fiscale compte apporter de nouvelles mesures. En vérité, Benachehou, avec ses vérités assénées, n?a fait que reprendre le cri d?alarme lancé par M. Bouderbala, directeur général des impôts, qui a reconnu il y a quelques jours que «son administration fait face à l?incivisme». Le directeur du fisc avait énuméré, rappelons-le, les principaux maux auxquels son département fait face. Il a notamment révélé que les registres du commerce «loués» permettent d?échapper au fisc et entraînent, du coup, des pertes de recettes énormes pour le Trésor, des recettes qui pourraient être destinées à la réalisation de milliers de logements et à la création de dizaines de milliers d?emplois supplémentaires annuellement. La non-facturation, la facturation fictive, le système de prête-nom, la procuration donnée à une tierce personne pour exercer en son nom une activité commerciale, la minoration des déclarations, le cadrage des bilans sont autant «d?astuces» qui font le bonheur de ces commerçants et autres opérateurs coupables d?être «inciviques» et portent un sérieux coup à l?économie nationale.