Au Maghreb, des Etats kharidjites et autres se constituaient malgré les répressions. En 800, le califat passa un accord avec les Aghlabides qui régnaient en Tunisie et à Tripoli. Ils reconnaissaient l?autorité de Bagdad, mais gardaient cependant une certaine autonomie pour ne pas dire une totale indépendance. En 803, Haroun al-Rachid se débarrassa des vizirs de la famille de Barmak, les Barmécides, qui gouvernaient depuis dix-sept ans. Il s?agissait avant tout, sans doute, d?écarter des personnages devenus trop puissants. Mais le problème du chiisme, que les Barmécides avaient essayé de régler par la douceur, passa au premier plan sous le règne de Ma?mun (814-833), fils de Haroun. Après avoir vaincu son frère Amin (809-814), Ma?mun donna la prépondérance aux influences orientales sur l?élément irakien. Il proclama un Alide héritier du trône et adopta comme doctrine officielle le mo?tazilisme, qui créait un terrain d?entente avec le chiisme modéré. Il persécuta les opposants doctrinaux et notamment Ahmad ibn Hanbal, dont se réclamera par la suite un mouvement sunnite extrémiste à base largement populaire. Le désordre financier, aggravé par le luxe de la cour et dû sans doute à des causes plus profondes, faisait sentir de plus en plus ses effets corrosifs. Vers le second tiers du IXe siècle, les militaires turcs eurent une influence grandissante et bénéficièrent de l?affermage des revenus de l?Etat, une pratique de plus en plus courante. Ils dominèrent finalement le calife. Les Abbassides quittèrent Bagdad, où le peuple leur était hostile, et s?installèrent dans la nouvelle ville de Samarra, de 833 à 892. Mutawakkil (847-861) se rapprocha des bases populaires en renonçant au mo?tazilisme et en réagissant contre les chiites, les chrétiens et les juifs. Mais l?évolution s?accentua. Les dynasties tahiride (820-872), çaffaride (867-903) et samanide (874-999), en Iran et les Toulounides (868-905), en Egypte et en Syrie, se rendirent pratiquement indépendants. L?Irak ne fut pas épargné : les Zang, esclaves noirs des plantations irakiennes, se révoltèrent (869-883). Mowaffaq, qui détenait le pouvoir réel sous le règne de son frère Mu?tamid (870-892), rétablit l?ordre en Irak ; il mit fin à l?anarchie créée par les prétoriens turcs, mata les Zang et limita les empiétements des dynasties iraniennes. Grâce à leur énergie, les califes Mu?tadid (892-902) et Muktafi (902-908) réussirent des prouesses semblables. Mais les problèmes demeuraient entiers et se compliquèrent d?éléments nouveaux. Le chiisme extrémiste canalisait, sous la forme révolutionnaire de l?ismaélisme, de multiples mécontentements diffus. A partir de 890, les Qarmates ismaéliens secouent tout le Proche-Orient. En 909, un calife ismaélien prit le pouvoir au Maghreb. La dynastie bédouine hamdanide (929-1003) s?installa au nord de l?Irak. Les bouyides, chiites iraniens des montagnes du Daylam (932-1055), fondèrent une dynastie en Iran. Le prince bouïde Mu?izz al-Dawla prit Bagdad, en 945, et se fit nommer par le calife émir suprême (amir al-umara, un titre créé en 936). Cette nomination lui conférait pratiquement la totalité du pouvoir.