Abandon Sales, torse et pieds nus, ballots sur le dos. Telles sont les images qui collent indéniablement au dos des malades mentaux qui arpentent à longueur de journée les rues d?Alger. Ils trouvent un malin plaisir à faire peur aux gens et prennent pour cibles la plupart du temps des jeunes filles, promptes à réagir avec des cris à chacune de leur approche. Il n?est pas rare de les voir fréquenter les arrêts de bus où il leur est plus facile de tirer les jeunes par leurs cheveux et susciter leur panique. Le reste du temps, ils déambulent en ville, les cheveux en boucles et crasseux et avec pour habits des guenilles. Un de leur autre passe-temps favori est la fouille des poubelles. A proximité des marchés, ils remuent tous les rejets à la recherche de quelques restes pour se nourrir. Les ongles, très longs, sont noirs à force de manipuler toute sorte de saletés. Les sachets d?ordures qui jonchent les rues sont systématiquement visités pour retirer tout ce qui peut leur «être utiles». Des paniers et cabas abandonnés sont récupérés pour contenir de vieilles couvertures et autres objets. Pour leur repos, ils préfèrent s?asseoir à même le sol, le dos appuyé contre un mur et les jambes allongées. Il faut veiller à ne pas les heurter. Lorsque les malades ne sont pas dérangés, ils donnent l?impression d?être paisibles, mais les enfants prennent un malin plaisir à les traiter de tous les noms et même à leur jeter des pierres provoquant immédiatement leur colère. A cet instant-là, le ton change et ils profèrent toute sorte d?injures et d?obscénités. Des scènes pareilles se répètent sans cesse à certains squares où ils se concentrent , c?est le cas près de la Grande-Poste ou sous les arcades du 1er-Mai ou de la Place des Martyrs. Certains n?hésitent pas à s?armer de gourdins, qu?ils trouvent légitimes d?utiliser pour menacer ou agresser les passants. La nuit, il leur arrive souvent d?être à la recherche de cartons qui leur servent de matelas. En plaçant leurs ballots à leurs côtés, ils sombrent dans un sommeil jusqu?au lendemain où le même train de vie reprend son cours. Leur préférence va aux bancs de jardins et places publics, sur lesquels ils peuvent s?allonger tranquillement au milieu de l?indifférence générale. Ces malades demeurent des années entières dans la rue, traînant leurs guenilles à longueur de journée et cherchant de la chaleur à proximité des bouches d?évacuation des hammams ou des boulangeries pendant l?hiver. Femmes, enfants et vieillards n?échappent pas à la règle.