Autrefois, beaucoup de gens allaient les pieds nus : les souliers étant surtout le fait des villes, ils étaient donc rares et, par conséquent, coûteux, dans les campagnes. Les souliers maghrébins les plus anciens étaient formés d'une semelle de cuir tanné que l'on plaçait sous la plante du pied et que l'on maintenait au moyen de lanières qui passaient par les chevilles et que l'on fixait entre les orteils. Les paysans utilisaient, eux, un autre procédé. lIs employaient également un morceau de peau sur le pied qu'ils fixaient avec des lanières, le poil retourné vers l?extérieur, en prenant soin de s'envelopper d'abord le pied de bandes d'étoffes. Ils passaient alors des cordelettes à travers les lanières et les attachaient aux jambes. Cette façon de se chausser doit être très ancienne: elle était partagée par les peuples de la Méditerranée, en tout cas elle était celle des bergers grecs au temps d?Homère. Les Berbères appelaient ces chaussures arkassen (pluriel de arkas) : le mot se retrouve partout y compris chez les Guanches des îles Canaries ? population d?origine berbère aujourd'hui disparue ? qui appelaient, selon le témoignage des auteurs espagnols du XVIe siècle, leurs chaussures xercos. Les montagnards espagnols appelaient leurs chaussures abarcas ou avarcas : selon l'étymologie admise le mot viendrait du latin barca «barque», à cause de leur forme qui évoque un bateau ou une barque plate. Mais il se pourrait bien que ce mot ne soit que la déformation de notre arkas que certains Berbères, notamment au Maroc, prononcent abargas, iburegsen. Aujourd'hui dans la plupart des dialectes berbères, le mot a pris le sens de souliers de labours. Notons que l?arabe algérien a conservé le mot sous la forme herkes (marcher en traînant ses savates).