Longtemps, les Algériens se sont contentés de priser le tabac : celui-ci était surtout utilisé comme remède notamment contre la migraine, appelée chqiqa, littéralement «fente». Le tabac, disait-on, agissait comme un ciment colmatant les «brèches» causées par la migraine. Aujourd'hui encore, beaucoup de personnes âgées disent priser du tabac pour calmer leurs maux de tête. Au demeurant, cet usage a été aussi celui du tabac au moment de son introduction en Europe, au XVIe siècle : Jean Nicot (c'est de son nom que dérive «nicotine»), ambassadeur de France à Lisbonne, avait envoyé de la poudre à priser à la reine Catherine de Médicis, lui recommandant de la fumer pour soigner ses migraines ! Comment l'idée est-elle parvenue à nos ancêtres de mâcher du tabac ? Sans doute s'agissait-il encore d'un usage médicinal : aujourd'hui encore, on use de ce procédé, dans les campagnes, pour tirer le jus de tabac et soigner les plaies. Peut-être a-t-on trouvé ce jus agréable et a-t-on pris l'habitude de priser par la bouche... La cigarette, comme ailleurs, a été précédée par le cigare ? sigar, dans les langues algériennes ? c'est-à-dire, au commencement, par des feuilles de tabac roulées et fumées. C'était la façon des Indiens de consommer le cigare ; les conquistadores les ont imités et ont appelé ces feuilles cigarro. Le cigarro est passé en Europe et de là au Maghreb, où il a été répandu par les navigateurs européens. La cigarette, elle, aurait été inventée, au XVIe siècle, par les mendiants de Séville qui avaient eu l'idée de récupérer les restes de cigarros jetés par les riches et de les rouler dans du papier : c'est le cigarillo. De cigarro et cigarillo, nous avons tiré le mot garro (cigarette). Le bout de la cigarette, le mégot, bunta, nous vient, lui aussi, de l'espagnol punta (pointe, bout).