Pour se débarrasser de quelqu?un, les Romains le renvoyaient aux calendes grecques, c?est-à-dire à un jour qui n?arrivera pas. Les Algériens, eux, préfèrent utiliser des expressions plus fortes, qui ne laissent aucun doute sur leur intention de ne pas rendre le service sollicité. L?une des plus courantes est «estena h?ata inewwar el melh? !» (attends que fleurisse le sel), ou «estena h?ata yenbet el melh? !» (attends que germe le sel !). Le sel, comme chacun le sait, ne germe ni ne fleurit ; c?est pourquoi nos grand-mères nous recommandent, quand on a fait un mauvais rêve, de jeter une poignée de sel en disant : «Que mon rêve ne se réalise que lorsqu?aura germé cette poignée de sel !» Moins brutales sont les formules qui renvoient à une période de l?année : «Estena, ya Susa, h?ata itt?ib lkermasu.» (Attends, ô Susa, que les figues de Barbarie mûrissent.) Les Kabyles, eux, disent souvent : «Ruh? a ya?ârab ar tfsut !» (va, ô Arabe, jusqu?au printemps !) Aujourd?hui, on se montre encore moins brutal pour refuser un service. Les formules les plus courantes sont «nh?awel» (je vais essayer), «ma n wâ?dekch?» (je ne te fais aucune promesse), «nchuf ula neq dar» (je vais voir si je peux faire quelque chose). On ne vous dit jamais «non», mais on ne vous dit pas, non plus, «oui». Quant aux entreprises auxquelles on envoie une demande d?emploi ou aux mairies desquelles on sollicite un logement, elles répondent toutes que votre demande va être étudiée et qu?on vous répondra en temps opportun. Autrement dit, «teqder testena» (tu peux attendre) !