Réalité Trois décennies après l'éclatement du conflit qui a ensanglanté le pays pendant 15 ans (1975-1990), la scène politique libanaise reste dominée par les chefs de guerre. A l?heure de la fin de la tutelle syrienne, ces chefs évolueront désormais selon qu?ils soient pro ou anti-syrien, dont le chef druze de la milice du Parti socialiste progressiste (PSP), Walid Joumblatt. Propulsé sur le devant de la scène, plus particulièrement depuis l?assassinat de Hariri, il est l'un des principaux meneurs du camp anti-syrien. Dans le camp opposé, le chef du mouvement chiite Amal, Nabih Berri, qui préside le Parlement, est la figure de proue du rassemblement pro-syrien. Plusieurs leaders de guerre ont été assassinés. D?autres sont emprisonnés, dont le dernier chef de la milice chrétienne des Forces libanaises (FL), Samir Geagea, qui croupit en prison depuis onze ans. Son prédécesseur, Elie Hobeika, a été assassiné en 2002 et ses assassins jamais appréhendés. Peu avant sa mort, il s'était déclaré prêt à témoigner du rôle de l'actuel Premier ministre israélien Ariel Sharon dans les massacres des camps palestiniens de Sabra et Chatila lors de l'invasion israélienne du Liban en 1982 (de 800 à 2 000 morts en deux jours, selon les estimations). Bachir Gemayel, le fondateur, élu président de la République dans la foulée de l?invasion israélienne, a été assassiné, en septembre 1982, par un membre du Parti social national syrien (PSNS), avant même d'entrer en fonction. Quant au général Michel Aoun, chef d'un gouvernement de militaires chrétiens (1988-90), il vit en exil en France depuis 15 ans après avoir été chassé du pouvoir par une offensive militaire syrienne. Dans le système clanique et semi-féodal libanais, les chefs de guerre ont souvent hérité leurs «charges» de leurs parents. Ainsi, Walid Joumblatt a succédé à son père Kamal, chef de la gauche libanaise et allié des Palestiniens, assassiné en 1977 après être entré en conflit avec la Syrie. Bachir Gemayel, lui, était également l'héritier de son père, Pierre, fondateur du parti Kataëb (phalanges chrétiennes). Des combats fratricides ont également éclaté dans le camp musulman, comme les conflits interchiites et ceux qui ont opposé, de 1985 à 1988, Amal aux combattants loyaux à Yasser Arafat, assiégés dans les camps de réfugiés et que les Syriens voulaient mettre au pas. L'élimination du facteur palestinien laissera les coudées franches à la Syrie, qui renvoie ses troupes à Beyrouth en 1987 et met en place une mosaïque de milices qu'elle domine, allant même jusqu'à sévir contre la milice du Hezbollah.