Le temps est à la réforme dans ce secteur vital. Au-delà des dissertations théoriciennes que seuls peuvent comprendre les spécialistes du domaine, ce sont des mesures concrètes qu?attend le citoyen. Des mesures à même de faciliter son accès à l?appareil judiciaire et de lui faire reprendre totalement confiance en la justice de son pays. C?est ce que relève une avocate au tribunal d?Alger qui a requis l?anonymat. Elle n?est pas la seule, la plupart des avocats rencontrés au tribunal d?Alger préfèrent, en effet, parler sous le couvert de l?anonymat lorsqu?il s?agit d?évoquer la question de la réforme de la justice. Par rapport aux nouvelles mesures d?urgence qu?a évoquées le ministre de la Justice lors de la conférence nationale sur la réforme de la justice qu?a abritée le Palais des nations les 28 et 29 mars dernier, cette avocate précise : «Le problème de l?appareil judiciaire n?est pas un problème de textes de loi, mais un problème d?hommes. On a beau changer ces textes, les mentalités restent.» «Certains magistrats refusent d?appliquer ces nouvelles mesures, tel le droit de la défense d?assister à la présentation de son client devant le procureur sous prétexte que ce dernier n?a pas encore reçu d?instructions de ses supérieurs.» Cette robe noire ne nie pas, cependant, l?importance d?adapter les textes de loi aux changements opérés dans la société, mais insiste sur le problème des lenteurs dans la procédure judiciaire, les dépassements dans l?application de la loi par le justicier et le problème de bureaucratie qu?il faut assainir. Elle cite, dans ce sens, l?exemple de la surpopulation dans les prisons qui est le résultat, selon elle, du non-respect des droits fondamentaux des individus. «La détention, censée être une exception et la liberté une règle, est inversée pour devenir une règle et la liberté une exception», notera-t-elle. Une autre avocate partage cet avis : «La plupart des personnes présentées devant le procureur de la République font l?objet de mandat de dépôt alors que, souvent, l?affaire ne le mérite pas et devrait être classée au niveau de la police.» Notre interlocutrice se demande : «Est-ce rendre justice et préserver les droits des justiciables lorsque plus de la moitié des affaires jugées au civil sont des décisions de rejet en la forme sans toucher au fond ou à la limite font l?objet d?une désignation d?expert qui, souvent, ne se justifie pas puisqu?elle n?est pas demandée par les concernés mais est liée généralement au désintérêt de certains magistrats à trancher l?affaire.»