Manifestation La Cinémathèque algérienne abrite un cycle de la cinématographie iranienne. La première séance a été marquée par la projection de Le Vent nous emportera, un film de Abbas Kiarostami. Le film, réalisé en 1998, raconte un jeune citadin, Bezad, qui, venant de Téhéran, la capitale, débarque dans un village perdu dans les contrées reculées du Kurdistan et isolé du monde extérieur. D?abord indifférent à la vie du village, Bezad finit, peu à peu, par s?intéresser au monde qui l?entoure et par s?y adapter. Il découvre une société bien différente de celle de la ville à laquelle il appartient. Il apprend à les connaître ? et à les aimer. Au fil des jours, il finit par apprécier les habitants du village et devient encore plus proche d?eux. Il se lie d?amitié avec un jeune enfant. Le film reflète une situation sociale précise, il ne prétend cependant pas raconter tout l?Iran. Il n?a pas, non plus, la prétention de véhiculer un message, seulement ce désir de montrer des faits et de présenter une situation. Il montre une société agricole qui vit modestement ? et peut-être loin des réalités extérieures. Abbas Kiarostami ne transmet pas un message de peur de dérouter le public et le plonger dans des interprétations dispersées, erronées et divergentes. Le réalisateur préfère (on le perçoit bien) travailler plutôt sur l?image que sur le dialogue et la narration. D?ailleurs, l?image parle d?elle-même. Il y a, en effet, un réel travail ? et un choix ? de l?image. Une image ouverte et laïcisante sur laquelle l?auteur met l?accent. Le réalisateur interpelle l?imagination du public, qui doit être doté d?un esprit ouvert pour parvenir à percer l?image «fabriquée» par le cinéaste, qui la lui offre. Certes, la cinématographie de Abbas Kiarostami apparaît comme une expression relevant de l?abstrait. Puisqu?il est question d?images, il se trouve que le réalisateur sollicite l?attention du public qui regarde son film. Ce qui retient notre attention dans ce film, c?est l?effet de redondance. Il y a, effectivement, un travail de répétition : les paysages ou encore les scènes se répètent, mais pas de la même manière, évitant ainsi de lasser le public. En outre, Abbas Kiarostami affiche un refus catégorique de la musique, donc du mélodrame. Il refuse d?utiliser la musique qui, pour lui, constitue «une béquille de la dramatisation». Le film semble muet parce qu?il est dépourvu de musique. Toutefois, le réalisateur refuse d?imposer au public des instants d?émotion ou de lui dire à quel moment il doit ressentir une situation. Le Vent nous emportera est un film s?exprimant sans fard ni complaisance ; il se veut réaliste, humain, et donc véridique.