Politique L?un est Japonais, l?autre Kurde. Deux films retracent les événements de Bagdad. L'Irak s'est invité sur La Croisette, à Cannes, où les deux films présentés en compétition ? l'un japonais, l'autre signé par un Kurde d'Irak ? ont pour protagoniste ce pays dont les déchirements peuvent être ressentis aux quatre coins de la planète. Avec Harcèlement, le réalisateur Masahiro Kobayashi aborde le sujet polémique des ex-otages japonais en Irak, traités en parias après leur retour. En suivant l'errance désespérée d'une ex-otage, Yuko, Masahiro Kobayashi veut «montrer la psychologie, les sentiments d'une jeune femme complètement isolée, ostracisée dans une société qu'elle ne comprend pas et qui ne la comprend pas». Le retour de Yuko tourne au calvaire : toute la société japonaise semble s'être liguée contre elle après avoir été embarrassée et consternée par l'attention internationale dont Yuko a été l'objet. Elle subit des insultes dans la rue, des coups de téléphone anonymes et même des violences physiques. Même si Harcèlement est présenté comme une fiction, le film s'inspire de l'histoire réelle des trois premiers otages japonais rentrés chez eux en avril 2004. «Le harcèlement d'otages est un sujet tabou au Japon», constate le cinéaste de 51 ans. «D'ailleurs, je n'ai pas de distributeur, même si j'espère en trouver un ici à Cannes», confie-t-il en souriant. Dans Kilomètre zéro (coproduction franco-kurde), le regard sur l'Irak est cette fois-ci intérieur. Le réalisateur Hiner Saleem, Kurde irakien qui a quitté son pays au début des années 1980 et vit désormais à Paris, raconte l'histoire d'un soldat kurde enrôlé de force dans l'armée de Saddam Hussein pendant la guerre Iran-Irak, et obligé de traverser le pays avec un chauffeur de taxi arabe pour ramener le corps d'un martyr tué au combat à sa famille. L'occasion pour Saleem de revenir sur l'oppression qu'a connue son peuple sous la dictature de Saddam Hussein, de la part de la majorité arabe du pays. «Je ne voulais pas montrer dans ce film-là (tourné au Kurdistan irakien après la chute de Saddam, ndlr) combien de gens Saddam avait tués, a expliqué le réalisateur. ça aurait été trop facile, presque opportuniste et malhonnête. Je voulais recréer une atmosphère, faire respirer le parfum de la dictature.» Pour Saleem, «le Festival de Cannes est très important car il donne une carte de séjour, un visa pour le monde entier au cinéma kurde, qui a longtemps été interdit en Irak».