Itinéraire Gilles Rondo, plasticien de formation, dirige, depuis une dizaine d?années, Accrorap, une compagnie de danse hip-hop. InfoSoir : Parlez-nous de votre projet. Gilles Rondo : Nous travaillons depuis un an et demi sur un projet de formation avec des jeunes danseurs de hip-hop d?Alger. Nous sommes déjà venus trois fois pour recruter de jeunes danseurs, pour ensuite encadrer des ateliers et réaliser la création d?un spectacle en France. Et là, nous sommes revenus pour le suivi du groupe et préparer le retour en France qui se fera dans un mois et demi. Il faut savoir que ce spectacle entre dans le cadre de l?Année de l?Algérie en France. En quoi consiste ce spectacle ? C?est un projet qui fonctionne autour de la danse hip-hop qui existe à Alger depuis quelques années. Les jeunes ont découvert le hip-hop grâce à Internet et à la parabole, puis ils se sont formés tout seuls, dans la rue. Nous avons découvert cela il y a environ deux ans et nous avons eu envie de les aider, de placer sous les feux de la rampe cette forme de danse qui est maintenant très développée en France. Nous voulons à présent la développer, ici, en Algérie. Quel est l?objectif de ce spectacle ? Il y en a plusieurs, le plus important c?est d?initier quelques jeunes danseurs hip-hop d?Alger à l?écriture et à la création d?un spectacle et leur faire comprendre comment cela fonctionne en France, pour ensuite leur donner quelques outils s?ils veulent devenir autonomes et essayer de créer des choses ici. D?ailleurs, notre but est d?aider à l?émergence d?une compagnie de danse de hip-hop en Algérie. Parlez-nous du titre du projet ? Makache Mouchkil. On est arrivé à ce titre, parce qu?on s?est aperçu que c?est une expression qui est employée par tout le monde ici, en Algérie. On voulait un titre un peu neutre, un peu générique, mais qui reflète bien l?état d?esprit de la jeunesse algérienne. Que raconte le spectacle ? C?est un spectacle en deux parties qui a été fait par deux chorégraphes distincts : Mourad Merzouki et Kader Attou. La première partie, intitulée Récréation, est quelque chose de très joyeux ; et la deuxième, Douar, fait référence aux problèmes de l?Algérie d?aujourd?hui. On s?est inspiré de ce que racontaient les danseurs eux-mêmes, et de ce qu?on avait ressenti en Algérie, une société bloquée où les gens, tout en gardant leur bonne humeur, continuent à dire Makache Mouchkil. Qu?a la danse de sensationnel ? Ce qui est intéressant avec la danse, c?est que c?est un langage sensible qui ne mérite pas forcément d?explication, c?est-à-dire qu?il peut être compris par tout le monde. Chaque spectateur ressent les choses à sa façon. La danse hip-hop, qui est une danse relativement spectaculaire et où il y a beaucoup d?acrobaties, parle à tout le public. Il y a effectivement une émotion qui peut naître assez facilement avec la danse. Vous êtes plasticien. Adaptez-vous vos expériences en la matière dans le travail que fait la troupe ? J?ai travaillé sur la question de l?identité, par rapport au problème de l?immigration en France, par rapport à la composition de notre société aujourd?hui qui est complètement cosmopolite. Ce que j?ai expérimenté dans le travail de plasticien, je le transpose plus au moins dans la danse dans la mesure où l?on travaille beaucoup sur la thématique du dialogue avec les cultures. Un dernier mot ? Les gens doivent prendre conscience de l?importance du hip-hop phénomène, qu?il faut encourager parce que c?est un outil social très intéressant pour fédérer entre eux plein de jeunes, pour éviter les problèmes de rivalité entre les quartiers. Cela permet à beaucoup de jeunes de se rencontrer autour d?une activité, d?une passion, de quelque chose de partagé. C?est une occupation positive et une façon très intelligente de lutter contre le dés?uvrement.