Vote La première étape vers des législatives anticipées en Allemagne a été franchie sans anicroche : comme le souhaitaient tous les partis politiques, Gerhard Schröder n'a pas obtenu de vote positif sur la question de confiance qu'il a posée au Bundestag. L'opposition de droite, en toute logique, lui a refusé sa confiance avec 296 voix, soit deux de plus que le potentiel numérique de la CDU-CSU et du FDP réunis. La coalition rouge-verte, quant à elle, a pour moitié suivi l'«invitation» de récuser, pour la forme, la confiance, avec 148 abstentions. Mais 151 élus du camp gouvernemental l'ont quand même accordée au chancelier, sans vouloir se prêter à son jeu. Il fallait pourtant que Gerhard Schröder passe par cet artifice, la loi fondamentale ne prévoyant pas d'autre voie pour une dissolution avant terme du Bundestag. La décision est maintenant entre les mains de Horst Köhler, le président de la République, qui a 21 jours pour se déterminer. S'il accepte de dissoudre, les élections seront sans doute fixées au 18 septembre, un an avant l'échéance. Le chancelier se devait de motiver son geste de manière à éviter tout soupçon de violation d'une Constitution qui lui impose de plaider l'existence d'une majorité devenue trop instable pour gouverner. Il s'est référé aux «débats conflictuels» au sein de son propre parti sur son programme de réformes, effectivement contesté par l'aile gauche du SPD. Il a mentionné les «tensions internes» entre les sociaux-démocrates et leurs partenaires Verts de la coalition. Enfin, il a eu recours à la formule de «la perte de confiance continue», relevée par la Cour constitutionnelle quand elle a, non sans réticences, confirmé la légitimité de la démarche analogue entreprise par Helmut Kohl en 1982. Comme le chancelier, Franz Müntefering, le président du SPD, a plaidé la nécessaire «légitimation» par les urnes. Il risque pourtant de faire capoter l'argumentaire sur la réalité de l'absence de soutien parlementaire aux réformes. Tout en affirmant avoir eu à plusieurs reprises des «craintes sur la capacité d'action» du gouvernement du fait de dissensions internes, il a expliqué en effet que le chancelier disposait toujours de «la confiance du groupe parlementaire SPD». Une «erreur», de l'avis de plusieurs constitutionnalistes. Mis devant le fait accompli par Gerhard Schröder, qui a choisi seul le chemin du scrutin anticipé, les Verts ne s'y sont pas opposés. La voix éraillée, Joschka Fischer a semblé vouloir reprendre les accents d'un leader de l'opposition en vantant les mérites d'une «société solidaire» et d'une «solidarité internationale», aux antipodes de la volonté d'une «modernisation froide» prêtée à la droite. Une droite qui est la première à vouloir ces élections avancées d'un an, puisque tous les sondages la donnent victorieuse. Le dernier en date crédite la coalition sortante de 33% des intentions de vote, contre 53% à l'alliance CDU-CSU-FDP. Rien d'étonnant, dans ces conditions, qu'Angela Merkel, chef de file des conservateurs, se soit attardée sur les problèmes internes de la gauche, comme si elle voulait persuader le président de la République et les juges constitutionnels de la véracité du pieux mensonge énoncé par le chancelier.