Résumé de la 1re partie n Jane, la femme de Marc Ulmer, le trompe avec Pierre Moulin. Les deux hommes l?aiment à la folie. Une folie allant jusqu?à un «duel au poison» afin que l?un d?eux disparaisse. Jane est juge et témoin. D'un geste qu'il veut paternel, Marc Ulmer calme la jeune épouse, il explique qu'au contraire sa solution est frappée au coin du bon sens. Elle est équitable : ou M. Moulin meurt et tout rentre dans l'ordre, ou la voilà veuve, riche et libre de vivre avec lui. Cet argument péremptoire coupant court à toute discussion, Marc Ulmer prie son rival d'écrire sa lettre de rupture avec la vie. Cette invitation semble provoquer chez le jeune suborneur un trouble évident. «J'aimerais mieux que nous l?écrivions ensemble...» De quoi se méfie donc cette petite crapule ? pense le vieil homme. Aurait-il peur qu'une fois en possession de l'annonce du suicide, je sorte un revolver pour l'exécuter à bout portant ? Cette idée amène un sourire sur les lèvres de l'auteur... il n'avait pas songé à cette éventualité. Son propos étant tout autre, Marc accède au désir du jeune homme. Il dicte la lettre tout en l'écrivant : «Je soussigné...? nom, prénom...? sain de corps et d'esprit, décide de mettre fin à mes jours. Ne m'en veux pas trop. Adieu Jane. Date et signature. Sur l'enveloppe, vous mettez pour Jane.» Marc Ulmer jouit pleinement de sa situation dramatique. Jamais dans l'exercice de son métier il n'avait éprouvé une telle satisfaction des acteurs qui jouent enfin la vérité totale... «Voyons maintenant quels verres prendre.» Fidèle à la tradition théâtrale, Marc Ulmer possède une collection de verres, sur lesquels il a fait reproduire les affiches de ses ?uvres jouées à Paris. Après avoir jeté un regard sur l'ensemble de la collection, deux titres semblent parfaitement convenir à la situation : Cornuto et Un de trop. «Le porto enlèvera au poison son goût amer... C'est toi, Jane, qui vas le verser pendant que nous allons sortir un instant dans le corridor.» Quelle jubilation pour un auteur ! Comme les visages de ses deux interprètes sont intéressants, pense Marc, et ça ne fait que commencer... «Vous venez, monsieur Moulin ?» Le jeune homme s'extirpe de son fauteuil, les deux hommes s'apprêtent à sortir lorsque Jane semble soudain sortir de la prostration dans laquelle elle est plongée. «Attends ! je voudrais te parler. ? A moi ? demande Marc. ? Oui, mais seul.» Comment ne pas exaucer une telle prière, surtout dite avec un tel accent de sincérité ? Marc invite son jeune rival à sortir de la pièce. «Et pour une fois, ayez la correction de ne pas coller votre oreille derrière la porte.» Sans un mot, sans même un regard vers celle qu'il a séduite, Pierre quitte le bureau. Il est à peine sorti que Jane se jette aux pieds de son mari. Avec des sanglots dans la voix, elle le supplie de ne pas mettre à exécution cette odieuse machination. Comme Marc semble rester insensible à ses arguments, elle lui dit que c'est lui qu'elle aime, que l'attirance qui l'a poussée à céder aux avances de Pierre n'était qu'une passade dont elle ressent toute l'horreur aujourd'hui. «Je ne veux pas te perdre.» Jane baisse la voix au point que l'homme est obligé de lire sur ses lèvres ce qu'elle ose prononcer : «C'est lui qui doit mourir ! pas toi...» Malgré lui, Marc Ulmer sent un frisson lui parcourir la nuque. Ainsi, cette garce tiendrait suffisamment à lui pour piper les dés. «C'est toi qui dois choisir le verre en premier, n'est-ce pas ? ? En qualité d'offensé, oui, c'est moi. ? Quel verre choisiras-tu ?» Marc objecte que Pierre pourrait soupçonner qu'il y ait une connivence entre eux. Jane affirme qu'il a trop confiance en elle pour imaginer une telle machination. (à suivre...)