Evénement n Des manuscrits anciens de l'institut Ahmed-Baba de Tombouctou sont, pour la première fois, exposés au public à Johannesburg. «C'est la première fois que des manuscrits quittent l'institut. Normalement, ils n'en sortent jamais pour des raisons de préservation et de sécurité», dira Mohamed Gallah Dicko, directeur de l'Institut Ahmed-Baba. Seize des quelque 25 000 manuscrits conservés dans ce centre de recherche ont fait le voyage de Tombouctou, dans le nord du Mali, jusqu'à la pointe sud de l'Afrique. Certains de ces textes, parfois enluminés à l'or fin, datent du XIIIe siècle. «Il y a là une biographie du Prophète, Mohamed, mais aussi des traités de musique, d'astronomie, de physique, de pharmacopée traditionnelle. Nous avons voulu montrer que, contrairement à ce que les gens pensent souvent, les manuscrits ne traitent pas que d'islamisme», a expliqué M. Dicko. Mais ces textes, précieux témoignages des échanges culturels africains dont la mythique Tombouctou était le carrefour, sont menacés. Le bâtiment de l'institut date de 1970. Les manuscrits sont mal protégés des intempéries (vents, pluies), mais aussi du soleil, de la poussière, des insectes... «Nous avons un problème majeur de conservation. C'est pour cela que nous avons fait un appel de fonds», a reconnu M. Dicko. Cet appel de fonds vise à réunir 4,7 millions d'euros en vue de construire un nouveau centre de conservation et de former une douzaine de professionnels en matière de conservation des manuscrits. Cet appel intervient dans le cadre d'une initiative Afrique du Sud-Mali lancée en 2003. Il s'agit du premier projet culturel parrainé par le Nouveau partenariat économique pour l'Afrique (Nepad). «Il y a là une démarche idéologique : il s'agit d'un projet Sud-Sud pour nous aider les uns les autres», a précisé Riason Naidoo, directeur du projet au ministère sud-africain des Arts et de la Culture. Depuis 2003, une douzaine de conservateurs maliens viennent, chaque année, à tour de rôle, se former pendant deux mois en Afrique du Sud et des techniciens sud-africains se rendent à Tombouctou pendent deux semaines par an, au cours desquelles ils forment aussi des membres des familles détentrices de manuscrits. Selon Mohamed Dicko, «il y a plus de 100 000 manuscrits gardés dans cinq bibliothèques privées et par de nombreuses familles à Tombouctou. Les gens y sont très attachés. Certains savent ce qu'ils contiennent. Mais qu'on sache ce qu'il y a dedans ou pas, on les garde jalousement comme un bien de famille».