Désordre n L?APC d?Alger-Centre devient curieusement, en ce mois de ramadan, le lieu de rencontre des vieilles du quartier et aussi un ring pour les jeunes qui veulent en découdre coûte que coûte avec tout le monde. «On a eu notre première bagarre, la première heure du premier jour du ramadan» dira un employé avec une note d?humour. Selon lui, «la violence verbale est dans notre culture» et les gens «viennent pour chercher querelle et non pas pour régler leurs problèmes de paperasses». Un constat que partage son collègue : «Pourtant, on tente de faire de notre mieux, mais les gens sont mal éduqués. Chacun veut régler ses problèmes en premier parfois au détriment des autres.» Cette situation crée «des tensions entre les citoyens» et lorsqu?un employé tente de s?interposer pour mettre de l?ordre, «tout le monde lui tombe dessus», précise-t-il. Deux salles regroupent les guichets de délivrance des pièces d?état civil. Pour les fiches familiales, une certaine fluidité caractérise le service. Les employés travaillent calmement, chacun est absorbé par sa tâche ; les citoyens attendent tranquillement entre deux et cinq minutes. Par contre, pour la légalisation des documents, c?est une autre histoire. Beaucoup de gens sont alignés dans une grande chaîne. La file d?attente, constituée de quatre rangées, s?étale sur des dizaines de mètres et regroupe des centaines de personnes. Face à elles, deux employés travaillent tranquillement. Une tranquillité qui agace les gens, car elle est incompréhensible. «Regarde, ils prennent tout leur temps pour légaliser un papier» dit un homme ; «ils ne peuvent pas faire vite ?» ; «pourquoi l?APC ne mobilise pas davantage d?employés ?». Chaque commentaire, chaque question résonne pendant une éternité dans la tête des gens, puis la réaction apparaît peu à peu. Les visages se métamorphosent, les langues se délient et descendent en flammes les responsables, le maire et tous ceux qui portent casquette. «On n?est pas nombreux», dit un employé pour justifier les lenteurs. Et de préciser : «Tous les gens qui résident dans d?autres communes et travaillent au centre d?Alger viennent ici retirer leurs papiers. C'est ce qui explique ce surnombre.» Pour le chef de service, il est difficile de travailler pendant le mois de ramadan car les gens deviennent agressifs ; «pour un oui ou un non» c?est la bagarre. A l?annexe de Télémly, c?est une autre atmosphère, calme et sereine. La salle est vide. Les quatre filles qui travaillent au guichet s?ennuient : «Lorsqu?on voit quelqu?un venir retirer ses papiers, nous sommes heureuses» dit une fille, car pour elle : «Le ramadan sans occupation est terriblement difficile.»