Inquiétude n Elles ont épuisé depuis longtemps leurs réserves d?eau et elles doivent en trouver très vite si elles ne veulent pas mourir. Voilà plusieurs heures que les deux femmes avancent péniblement, dans le désert, sous un soleil de plomb. Leurs fines chaussures en peau de gazelle les protègent mal de la chaleur du sable qui leur brûle la plante des pieds. Pour ne pas fatiguer leurs chameaux, leur seule chance de survie dans ce monde hostile, elles vont à pied, en dépit de la fatigue qui pèse sur elles, tenant leurs bêtes par la laisse. C?est, à perte de vue, un océan de dunes que la lumière du soleil revêt de mille couleurs. Si pour les gens du désert, le spectacle des dunes s?étendant à l?infini procure une sensation d?apaisement, pour ceux qui n?ont pas l?habitude des grands espaces, c?est plutôt une sensation d?angoisse qui prédomine. Ces monts dorés qui se succèdent à l?infini vont-ils prendre fin ? Et si jamais on en vient à bout, que découvrira-t-on au-delà ? ? C?est encore loin ? demande l?une des jeunes femmes, dont les vêtements, les bijoux et l?allure dénotent une origine noble. ? Patience, maîtresse, nous pourrons bientôt nous reposer ! Les deux femmes qui marchent ainsi dans le désert sont venues de loin, de très loin même puisque, selon la légende, Tin Hinan et sa servante, Takama, sont originaires du Tafilalet, montagne située dans le sud-ouest du Maroc actuel. La légende ne dit pas pourquoi les deux femmes se sont aventurées dans le désert, aussi toutes les hypothèses ne sont-elles pas exclues. Tin Hinan fuyait, peut-être, quelque ennemi, comme jadis Didon quittant les côtes de Phénicie pour trouver refuge en Afrique, à moins qu?elle n?effectue un voyage initiatique pour se purifier dans le désert où l?attend une grande destinée? Cependant, les deux femmes avancent toujours dans le désert et, au fur et à mesure que le temps passe, la soif commence à se faire ressentir. Elles ont épuisé depuis longtemps leurs réserves d?eau et elles doivent en trouver vite si elles ne veulent pas mourir. L?eau, elles savent que le désert n?en est pas totalement dépourvu et que se cachent, dans les anfractuosités des rochers, des flaques qui peuvent être suffisamment importantes pour les abreuver et abreuver leurs bêtes, mais il faut les chercher, escalader les rochers, aller dans les montagnes qui se dressent au loin. Mais il n?y a pas que les réserves d?eau que l?on trouve dans les trous des rochers, il y a aussi l?eau des oueds, invisibles à la surface, sauf en période de pluies, mais qui coule sous le sol. Il suffit de repérer le lit d?un de ces oueds et de creuser pour parvenir au précieux liquide. C?est ce que les gens du désert appellent abankor. A un mètre de la surface, on trouve suffisamment d?eau pour se désaltérer et faire des réserves. Et quand on est nombreux et qu?on peut creuser à 7 ou 8 mètres de profondeur, c?est un véritable puits que l?on fait sourdre dans le désert. Tin Hinan et Takama doivent trouver très vite un lit d?oued si elles ne veulent pas mourir de soif? (à suivre...)