Résumé de la 1re partie n Toutes les actions de Nino deviennent dangereusement imprévisibles. Il est emprisonné pour un crime dont il n?a pas souvenance. Si encore il n'avait pas hurlé, devant le procureur, que les salopards de garagistes n'avaient qu'à crever ? ça leur apprendrait à vivre ! Il n'a même pas pu assister aux funérailles de sa mère. Il n'a plus qu'une vieille photo dans sa cellule, du temps où il était gamin et où sa mère lui disait : «Nino, le monde est méchant avec nous...» Le monde est méchant avec Nino jusqu'en 1984. Il a cinquante-deux ans. Il fabrique des couronnes mortuaires en plastique. Des petites fleurs mortes à entrelacer sur un grillage. Il n'a pas de visites. Le diable sait où est son père qui ne l'a jamais reconnu ! Aucune famille, et pas une seule femme dans sa vie. La femme est un objet que Nino ne comprend pas. Août 1984. Chaleur humide, odeur de marécages autour de la prison. Dans son coin, sur une table de bois encombrée de couronnes inachevées, Nino écrit laborieusement une lettre bourrée de fautes d'orthographe à l'avocat qui fut jadis nommé d'office pour sa défense. «Monsieur l'avocat. Si vous plai, y fau m'aider. Jai tué une dame, je sais pas qui. A City Park l'année de avant le procès. Aidez moi si vous plait. Je veux savoir qui c?est la dame. Je tuai la dame c?est sûr.» Trois mois passent. Le temps pour l?avocat de se décider à faire quelque chose. Il va voir son ancien client, pour lui dire : «Vous êtes fou ? Parce que si vous n'êtes pas fou, le psychiatre le verra très vite. Si vous cherchez à sortir de prison de cette manière, c'est ridicule.» Nino ne comprend pas. «Je ne veux pas sortir de prison, je veux savoir qui est la dame que j?ai tuée. ? Vous savez que vous n?êtes pas le seul à essayer de tromper la justice de cette manière ? Le procureur en a par-dessus la tête des gens comme vous qui s'accusent d'un meurtre dont soi-disant ils ne se souviennent pas. C'est une vieille technique pour sortir de prison, passer des tests et se retrouver en psychiatrie. ? J'ai tué la dame. J'ai pas oublié, je m'en souviens. C'était dans City Park. Je l'ai jetée dans le bayou. Elle était habillée en noir avec un blouson en cuir rouge.» Tout de même, l'avocat demande : «Pourquoi l'auriez-vous tuée, cette dame ? ? Justement, je sais pas. Ça m'a pris, et je l'ai tuée. ? Vous auriez fait cela il y a huit ans ? Sans savoir pourquoi ? Et vous vous accusez maintenant ? ? Je la vois toutes les nuits. Je fais des cauchemars, je l'entends qui m'appelle. J'ai des remords. Ça me rend malade d'avoir tué quelqu'un sans savoir qui c'est, et sans savoir pourquoi.» L'avocat hésite à croire Nino Manadela. Il y a quelque chose d'anormal dans sa demande. Sa mauvaise conduite lui a fait perdre ses chances d'une libération conditionnelle. D'autre part, lorsque lui-même a essayé de le défendre, du moins de lui obtenir des circonstances atténuantes, un psychiatre lui a renvoyé son client en le qualifiant de paranoïaque ordinaire, conscient de ses actes, donc responsable. En admettant ? rien n'est moins sûr ? que Nino soit réellement coupable d'un autre meurtre, tout ce qu'il récoIterait serait la prison à vie. Plutôt deux fois qu'une. Mais Nino s'obstine. «Bon, donnez-moi des détails plus précis. La date exacte ? ? Je sais plus. Sauf que je travaillais sur les quais, c'était pas loin de Noël, et il pleuvait. La dame était dans une voiture, elle est sortie de la voiture, y avait un type dans la voiture, il est parti en la laissant là. ? Une prostituée ? ? Faut pas dire ça. J'en sais rien. ? Que s'est-il passé avec elle ? ? Je sais plus. Elle m'a demandé si je pouvais lui indiquer sa route. Je lui ai montré la direction, et elle m'a demandé si je voulais pas l'accompagner. J'ai dit que j'avais du travail et qu'il faIlait qu'elle attende, et puis que c'était loin. Alors elle a commencé à me raconter des trucs, comme quoi ce type l'avait laissé tomber, elle s'est assise là, devant le hangar, elle parlait tout le temps. Finalement je l'ai emmenée dans ma voiture. 0ù ? Je me souviens plus. (à suivre...)