Résumé de la 3e partie n Le policier revient à la charge avec d?autres photos de femmes assassinées aux environs de l?endroit indiqué par Nino. Nino répondit au détective qui l?interrogeait : «Je me souviens pas. Je sais pas ce qu'elle a dit. Je sais pas. Elle a enlevé cette espèce de veste qu'elle portait, elle avait presque rien en dessous. C'était honteux. ? C'est elle qui l'a enlevée ou c'est toi ? ? C'est elle. ? Tu es sûr, Manadela ? Tu n'as pas essayé de l'embrasser ? ? J'ai jamais embrassé une dame. Jamais. ? Alors c'est elle ? C'est elle qui a voulu t'embrasser ? ? Elle m'a touché. Elle m'a touché, je suis sûr. Elle avait pas le droit. ? Pourquoi ça ? T'aimes pas qu'on te touche ? ? Y a que ma mère qui a le droit. Elle est morte, ma mère. ? Tu n'avais pas un couteau dans ta voiture, Manadela ? ? Un couteau ? Si, j'avais un couteau. Je l'ai plus. ? Et où il est ? ? Je l'ai jeté. ? Où ça ? ? Quand je suis retourné travailler, le lendemain, je l'ai jeté dans le fleuve. ? Et le crochet ? Je croyais que tu lui avais tapé dessus avec le crochet ? ? Non, je l'ai tirée de la voiture avec le crochet, par terre, et puis après je l'ai portée. ? Pourquoi l'as-tu portée ? Pourquoi ne l?as-tu pas traînée avec le crochet jusqu'à l'étang ? ? Je pouvais pas... elle avait... elle était... ? Parce que tu l'avais déshabillée ? C'est ça, Manadela ? ? Je peux pas dire... je peux pas... je sais pas ce que j'ai fait. Je l'ai tuée, c'est sûr. ? D'accord. Tu as jeté les vêtements dans le fleuve ?» Silence. Nino Manadela semble faire un effort surhumain pour voir quelque chose, quelque chose d'enfoui loin et profond dans sa tête. «J'ai mis une corde, avec une vieille batterie, je l'ai fait, j'ai jeté le blouson rouge... Il était dans la voiture. ? Alors tu l'as déshabillée ? ? J'ai rien fait de ça. Je l'ai pas touchée. ? Tu l'as touchée puisque tu l'as tuée ! Pourquoi tu as tué cette fille, Manadela ? ? Elle me voulait du mal.» Le policier sort la photographie du dossier, Nino Manadela regarde le petit format, ahuri. « Alors ? Tu crois que c'est elle ? ? Vous l'avez trouvée ? Vous l'avez trouvée ? C'est elle ? ? C'est toi qui peux le dire. Pas moi.» Nino semble avoir peur de la petite photographie, où l'on voit un visage souriant mais triste, des cheveux foncés et très bouclés, un regard immense aux prunelles presque noires. Emma Diveau ressemblait à sa mère. A la mère de son enfance, celle qui le berçait en lui racontant que le monde était méchant. Elle avait ces grands yeux-là, ces cheveux-là, ce teint-là. Quand le père l'avait battue, elle avait cet air triste. Et quand les clients du bar lui faisaient des compliments, elle avait ce sourire-là. Au fil des semaines, avec l'aide d'un psychiatre, Nino Manadela a confié tant de choses. Qu'il était puceau, qu'il avait peur des femmes, qu'il n'aimait pas quand sa mère plaisantait avec les clients et faisait des «bêtises» avec eux. Qu'il avait commencé à faire des cauchemars en prison, quand on lui avait dit que sa mère était morte. Qu'il revoyait toujours cette «dame» qu'il avait tuée, en noir avec un blouson rouge. Mais il n'a jamais voulu admettre qu'il l'avait déshabillée. Il n'a jamais voulu admettre que c'était une prostituée qui lui avait fait des propositions. Il ne comprend toujours pas vraiment pourquoi il l'a tuée. Mais il est sûr que c'est elle. Preuves indirectes, absence de pièces à conviction, d'arme du crime, incohérences au moment de la reconstitution du crime : le jury n'a pas accepté que Nino Manadela soit reconnu officiellement coupable du meurtre d'Emma Diveau et l'a renvoyé dans sa cellule. Nino a été qualifié cette fois de fabulateur, de paranoïaque ordinaire dont les pulsions violentes sont peut-être dues à une affectivité délabrée depuis l?enfance. Mais le jury n?est pas certain, par manque de preuves, qu?il ait tué la dame qui lui proposait ses charmes. Et qui ressemblait tellement à sa mère?