La RN 38, comme une personne qui a des ?dèmes sur les mains et les pieds, est la grande malade de Gué de Constantine, de sa zone industrielle et des nouvelles habitations, prise depuis des années dans les tenailles de grossistes pour qui le mot «facture» ne veut absolument rien dire. Des culs-de-sac partout. De gros cratères tous les dix mètres, une route très mal décapée depuis des mois, mais toujours fréquentée par des camionneurs et des automobilistes qui prient pour ne pas tomber dans les guet-apens, ne pas voir leur véhicule faire des tonneaux et aussi éviter les voyous, nombreux sur les lieux. Armés de barres de fer et de crans d?arrêt, ils font la loi, leur loi, pour délester les usagers de leurs biens : portables, portefeuilles et tout ce qui peut être pris. Le gros butin, pour ces malfaiteurs, provient essentiellement des semi-remorques qui, venus de différentes wilayas charger de l?électroménager, du gaz butane, des matériaux finis ou semi-finis, éprouvent les pires difficultés pour entrer et sortir sans encombre des différentes unités de production de la zone industrielle, où pas moins d?une dizaine d?entreprises encourent aujourd?hui le risque majeur de mettre la clé sous le paillasson car leur chiffre d?affaires descend, parfois, sous le seuil des 50%. C?est le cas de l?entreprise Sonaric, leader national de l?électroménager, qui a perdu la quasi-totalité de ses clients. Naturellement, ces derniers, méfiants, ne veulent plus emprunter une route défoncée au risque d?abîmer boîte de vitesses, roues et cardans, mais aussi en raison de cette peur ? justifiée ? d?être détroussés par une meute de jeunes dés?uvrés qui passent leurs journées à tendre des souricières aux camions dans un endroit qui s?apparente plus à un no man?s land qu?à une zone industrielle. S?aventurer seul dans un tel endroit serait irresponsable compte tenu des risques encourus par tout «étranger» au quartier.