Résumé de la 47e partie n Pat rend compte à Luther Pelham de son enquête à Apple Junction, et repousse ses avances. Abigail, quant à elle, se prépare à intervenir au Sénat. Abigail elle-même mangeait très peu. Toby savait qu'elle était obsédée par le souvenir de sa mère, la pauvre vieille Francey, ce tonneau gémissant planté sur des jambes comme des poteaux terminées par des chevilles épaisses et des pieds si grands que l'on trouvait difficilement de chaussures à leur taille. Toby habitait un studio au-dessus du garage. Presque tous les matins, il venait préparer le café et presser un jus de fruits. Un peu plus tard, Abby se mettait au travail et il prenait alors un copieux petit-déjeuner ; si elle n'avait pas besoin de lui, il allait jouer au poker. Abigail entra dans la cuisine tout en épinglant une broche en or en forme de croissant sur le revers de sa veste. Elle portait un tailleur violet qui mettait en valeur le bleu de ses yeux. «Vous êtes splendide, Abby», déclara-t-il. Son sourire fut rapide et fugace. La perspective d'une longue intervention au Sénat la mettait à chaque fois dans le même état — d'une humeur de chien, prête à s'irriter à la moindre anicroche. «Ne perdons pas de temps à boire un café, dit-elle sèchement. — Vous avez tout le temps, lui assura Toby. Vous y serez à 6h 30. Avalez votre café. Vous savez bien que sinon, vous serez comme un crin.» Il laissa ensuite les deux tasses dans l'évier, sachant qu'Abby s'impatienterait s'il prenait le temps de les laver. La Cadillac était garée devant l'entrée principale. Pendant qu'Abby allait prendre son manteau et son attaché-case, Toby sortit rapidement pour mettre en marche le chauffage de la voiture. Vers 6h 10, ils roulaient sur l'autoroute. Abby était inhabituellement tendue, même pour un jour où elle devait prononcer un discours. Elle était montée se coucher tôt la veille. Il se demanda si elle avait pu dormir. Il l'entendit soupirer et fermer son attaché-case d'un coup sec. «Si je ne sais pas dès maintenant ce que j'ai l'intention de dire, autant laisser tomber, fit-elle remarquer. Si ce damné budget n'est pas voté rapidement, nous en délibérerons encore à Noël. Mais je ne les laisserai pas couper dans les programmes sociaux.» Toby la regarda dans le rétroviseur se verser du café maintenu au chaud dans une thermos. A sa contenance, il vit qu'elle avait envie de bavarder. «Avez-vous bien dormi la nuit dernière, Sénateur ?» De temps à autre, y compris lorsqu'ils se trouvaient seuls, il lui donnait du «Sénateur». Pour qu'elle sache que, malgré tout, il savait se tenir à sa place. «Non, j'ai mal dormi. Je n'ai cessé de penser à cette émission. J'ai été stupide de me laisser embarquer là-dedans. Cela va me retomber sur le dos. J'en ai le pressentiment.» Toby fronça les sourcils. Il avait le plus grand respect pour les pressentiments d'Abby. Il ne lui avait pas encore raconté que Pat Traymore habitait dans la maison des Adams. Elle y verrait un signe néfaste. Ce n'était pas le moment pour elle de perdre son sang-froid. D'ailleurs, à un moment ou à un autre, elle ne manquerait pas de l'apprendre. Cette émission commençait à lui faire mauvaise impression à lui aussi. (à suivre...)