Tendresse La subite rougeur de l?enfant et son embarras poussèrent sa mère à insister. Zineb portait les dernières touches à son maquillage qu?elle avait refait à plusieurs reprises. A chaque fois, il lui semblait trop voyant, bien qu?elle n?en ait mis que très peu. Elle était très nerveuse. «Tu es ridicule, à ton âge, on dirait une jeune fille qu?on va demander en mariage !», lui dit sa s?ur. Mais Zineb ne pouvait empêcher ses doigts de trembler, bien qu?elle fût pleinement consciente d?être ridicule. Elle ajusta encore sa gandoura à manches longues, prêtée par sa jeune s?ur, assortie à ses babouches. «Tu ne vas pas garder ton khimar devant lui !» gronda sa s?ur, incrédule. «Justement, et si on ne se plaît pas ? D?abord, je ne sais pas si je vais continuer cette histoire, je n?ai pas assez réfléchi...» Baya sentit que sa s?ur allait faire marche arrière, anéantissant tous leurs efforts, à elle et à sa mère, de remarier Zineb à un parfait inconnu, dont elles ne connaissaient que la famille, originaire de Béjaïa, et qui avait demandé la main de Zineb pour leur frère, Hocine, qui habitait Rennes «et qui était bon vivant, très bel homme, généreux, mais qui a divorcé de sa femme récemment, car elle l?avait trompé après plus de vingt ans de vie commune.» «C?est un émigré, et très riche, lui disait sa mère à chacune de ses visites. Qu?as-tu gagné dans ta vie jusqu?à présent ? Rien... Alors, épouse-le et profite un peu de la vie... D?ailleurs, ton père est d?accord !» «Il a juré de considérer tes deux enfants comme si c?étaient les siens ! Et puis, d?après sa s?ur, c?est un sportif... Je ne connais pas son âge, mais il doit être encore jeune. Et puis, il a bon c?ur, je l?ai tout de suite senti quand il m?a parlé au téléphone... Il a même l?air un peu naïf. Tu sais comment ils sont, les émigrés, ils ont un caractère simple, très différent, ouvert ! Tu vas être heureuse !», lui répétait Baya. Mais Zineb hésitait et se posait des questions. Comment va-t-il se comporter avec mes enfants, se demandait-elle souvent. Et quand elle en parla aux enfants, son fils Ali battit des mains : «Oui maman ! Marie-toi ! Moi je suis d?accord», dit-il du haut de ses dix ans et demi. «Pourquoi ?» lui avait-elle demandé. «Il m?achètera beaucoup de bonbons...» Mais c?est la subite rougeur de l?enfant et son embarras qui poussèrent sa maman à insister. «Ali... Dis-moi réellement pourquoi ! Je t?achète souvent des bonbons, moi aussi... Pourquoi ?» Un long silence. Ali avait baissé la tête. Zineb lui releva le visage doucement. Ses yeux étaient pleins de larmes. (à suivre...)