Publication n Vient de paraître, aux éditions Alpha, Kaki, le dramaturge de l'essentiel. Ce livre raconte cet auteur de la scène, mais aussi «décrit ses errements, ses incartades plutôt que de cerner un itinéraire dans le moule systémique d'une vision philosophique ou d'une école». L'ouvrage s'emploie à jeter la lumière sur un personnage longtemps méconnu pour certains ou ignoré pour d'autres. Car, et selon son frère Mazouz, «Kaki avait des difficultés à imposer ses nouvelles façons de faire du théâtre ; toutes les gens de sa génération étaient contre. C'est pourquoi il a misé sur nous les jeunes». Selon l'ouvrage, si Ould Abderahman Kaki suscitait tant d'admiration pour les uns et se heurtait au rejet de ses contemporains, c'est seulement parce qu'il avait apporté une rupture dans l'exercice de l'art des planches, une rupture essentielle et féconde puisqu'elle avait aiguillé le théâtre algérien sur des voies inédites. Cela en raison de ses idées et de sa vision qu'il portait sur le théâtre. Il est dit dans la préface que «Kaki n'est pas un homme de théâtre, c'est un phénomène de théâtre», un phénomène qui va briller par un talent de comédien et d'écrivain. Kaki avait des idées ; et ces idées, il les appliquait, voire les expérimentait. Son expérience unique fut l'originalité de son travail en laboratoire qu'il appelait «Avant Théâtre» et qui durera plus de dix ans. En effet, Kaki et sa jeune équipe s'investissaient à corps perdu dans une suite d'expérimentations théâtrales hors du public ; et au bout de quelques années, le dramaturge aboutira à la mise au point d'un langage dramaturgique : «Il intégrait la communication traditionnelle, la mémoire collective des spectateurs qui, dès lors, se sentiront interpellés par une scène qui évoque pour eux un espace intellectuel et communicatif familier, mais les pousse aussi à la remise en question de leur quotidien.» Ainsi, «la scène de Kaki est une présence physique et non verbale, le théâtre dépasse le texte», ce que rappelle Artaud : «Le théâtre est contenu dans les limites de tout ce qui peut se passer sur une scène, indépendamment du texte écrit.» Enfin, «pris entre la prépondérance de la belle parole dans la culture traditionnelle qu'il va recréer et la nécessité d'une gestuelle qui marque et démarque l'espace pour l'inscrire dans une dimension non verbale, mais physique, Kaki va, selon les productions, utiliser la centralité d'un meddah démiurge, articuler les mouvements autour d'un décor, d'un accessoire, voire d'une idée. Dans ce dernier cas, son théâtre présentera le sombre envoûtement d'un absurde raconté en d'autres lieux et en d'autres circonstances par Beckett, Ionesco et leurs émules.» L'ouvrage comprend, outre des repères biographiques et autres références à son travail de dramaturge, six pièces de théâtre, quatre nouvelles et un poème.