Classes n Si pour les uns vacances riment avec farniente, pour d'autres elles sont synonymes de labeur. Pour les enfants issus de familles à faibles revenus, les vacances d'été sont mises à profit pour gagner un peu d'argent, de quoi préparer la prochaine rentrée scolaire. On troque alors son titre d'écolier contre celui d'ouvrier agricole saisonnier et on prend la direction des champs pour participer à la cueillette des fruits d'été (pastèques, melons, raisins…) ou des légumes tels que les carottes. C'est un travail pénible qui commence à l'aube, au moment où d'autres enfants sont encore au lit. Karim est au collège ; il est originaire d'un village de la commune de Sidi Naâmane, une localité à vocation agricole. Son ami Hakim est de Tadmaït, une commune voisine. Tous deux travaillent dans un vignoble. «Pour aller dans les champs, il faut se lever très tôt ; je règle mon réveil à 4 heures pour me préparer, je prends rapidement un petit déjeuner léger, vous savez pour nous les pauvres, un crème et un bout de pain et c'est bon jusqu'à midi», raconte Karim, qui nous apprend que le travail commence à 5 heures. «A cette heure-là, il fait encore frais et c'est bon car cela nous évite d'être brûlé par le soleil.» Arrivé dans la région, il retrouve d'autres jeunes venus des villages voisins. «L'ambiance est bon enfant», enchaîne Hakim. Pour ce collégien qui passe en 2e année moyenne, «il vaut mieux travailler et gagner, à la sueur de son front, l'argent nécessaire à l'achat de livres et autres fournitures scolaires plutôt que d'aller voler ou demander à ses parents. Moi je n'ose pas demander à mon père de me donner de l'argent, je me débrouille et parfois même, quand je décroche un boulot bien rémunéré, je donne une partie de ma paie à ma mère». La cueillette du raisin est une tâche délicate. Il faut faire attention à ne pas abîmer les grappes dont les raisins sont d'excellente qualité cette année. Les ouvriers sont divisés en deux groupes : l'un coupe les grappes et les met dans des caisses, l'autre se charge du déplacement des caisses de vigne en vigne, puis vers la camionnette qui attend à l'orée du champ d'être chargée pour prendre ensuite la direction des marchés des wilayas de Tizi Ouzou ou de Boumerdès, où le kilo de raisin sera écoulé entre 60 et 90 DA selon sa qualité, son degré de maturité et sa fraîcheur. Le travail dans les vignes s'achève vers 10h 30, selon le climat. Les ouvriers ne travaillent pas lorsque la chaleur est trop forte. Ils regagnent alors leur maison pour se reposer, faire un petit somme, prendre une douche puis sortir en ville rencontrer les copains et parler de la plage. La plage, même si on n'a pas les moyens de s'y rendre, ne serait-ce qu'une journée. Karim et Hakim attendent leur salaire de saisonnier pour l'amputer d'une petite somme et ainsi aller bronzer sur le sable de la grande bleue. «Après tout, nous n'avons qu'à payer les frais de transport, nous préparons les sandwichs chez nous…», nous disent-ils en riant.