Séance n Le film, primé au dernier Festival de Cannes, a été projeté hier au cinéma l'Algéria. Réalisé par Rachid Bouchareb, le film, historique et à grand spectacle, retrace à travers l'itinéraire de quatre combattants un destin collectif longtemps occulté par la France : celui de plusieurs milliers de soldats africains et maghrébins ayant participé aux combats pour libérer la France de l'occupation nazie. Ces oubliés de l'histoire ont combattu aux côtés de la France (cette mère patrie) les uns motivés par le désir de fuir la misère, la solde leur permettant de survivre , les autres animés de la foi en un idéal : celui de la liberté que prônait la France coloniale. Mais une fois la guerre finie, ceux qui étaient accueillis en libérateurs par la population française retrouvent, une fois de retour au pays, leur statut d'indigènes : sans droit ni reconnaissance. Ainsi, le réalisateur traite un chapitre délicat et sensible de l'histoire de la France, un sujet non évoqué dans les manuels scolaires français et passé sous silence ; il exhume une mémoire enfouie dans les méandres de l'oubli, et cela pour rendre hommage à ces tirailleurs algériens, marocains, tunisiens, sénégalais, malgaches et autres, qui ont combattu pour la libération de nombreuses régions d'Italie et de France. Le film montre comment ces hommes que l'on appelait «indigènes» étaient utilisés comme de véritables chairs à canon. Ils étaient envoyés par les gradés aux premières lignes. Il montre également les inégalités et la discrimination rencontrées sur le front : ils étaient exposés aux pires exactions et humiliations. C'est donc à travers les personnages de Saïd (Jamel Debbouze), Abdelkader (Sami Aouajila), Messaoud (Rochdy Zem) et Yassir (Samir Nacery), que le réalisateur retrace l'itinéraire et le destin collectif et douloureux de ces indigènes, ces hommes qui ont combattu pour un pays et dont cette France qu'ils ont libérée a renié les droits les plus fondamentaux, à savoir égalité et liberté, reconnaissance et respect. À la fin du film, au générique, Rachid Bouchareb n'hésite pas à interpeller les autorités françaises en leur rappelant l'épineux problème du règlement des pensions des anciens combattants indigènes et leur alignement sur celles des Français de la métropole. Cette interpellation a eu en effet des retombées concrètes : le gouvernement français a décidé de revaloriser les pensions des anciens combattants originaires de l'empire colonial français.