Résumé de la 5e partie L?enquête, qui a duré deux ans, n?a pas abouti. Scotland Yard classe provisoirement l?affaire. Mais un détective privé rouvre le dossier. L?affaire est close, le dossier fermé. C?est un crime parfait et irritant, dont, bientôt, on ne parle plus. Car nul ne pouvait prévoir la conclusion d?une enquête comme celle-là. C?est en 1958, dix ans plus tard, alors qu?il y a prescription, qu?une lettre parvient à Scotland Yard, timbrée de Rhodésie. Son contenu est extraordinaire. Il demande vérifications. Ce qui est fait. Tout est contesté, les dates indiquées et les identités. Un policier anglais va même interroger sur place l?auteur de la lettre et revient, convaincu. La vérité est là. Elle ne sert plus à rien. C?est au cours d?un congrès de police, à Londres, que l?inspecteur Narborough la révèle à ses collègues, pour information et sans citer de nom, car il n?en a pas le droit, prescription oblige. Voici la lettre, elle est signée d?une femme. «Messieurs, je vis en Rhodésie depuis mon enfance, et je ne connais l?Angleterre que par ses journaux. C?est ainsi que j?ai peut-être lu l?histoire du crime de Joan Woodhouse, mais je l?ai oubliée. On ne retient pas forcément ce genre de choses quand elles ne vous concernent pas. «En septembre 1948, j?avais vingt-deux ans lorsque j?ai rencontré mon futur mari. Il arrivait d?Angleterre et nous nous sommes plu rapidement. C?était un homme attachant, sérieux. Nous nous sommes mariés six mois plus tard et nous avons eu des enfants. Pendant des années, j?ai été heureuse, et je n?ai rien soupçonné de grave chez mon mari. «Il y a quelques semaines, il est tombé malade, une simple fièvre, sans grande gravité, mais qui l?agitait énormément. Surtout la nuit. Il dormait mal, faisait des cauchemars, et je le veillais souvent. Une nuit, il rêvait, il était en sueur, et il s?est mis à parler tout haut. «C?est ainsi qu?il a raconté comment il avait tué Joan Woodhouse. Dans son cauchemar, il semblait affolé, terrorisé. J?ai entendu, nettement : «Non, non, ce n?est pas possible, Joan, réveille-toi ! Réveille-toi !» Il s?accusait, il répétait le nom de cette femme, et répétait sans cesse qu?il était un lâche et un assassin. Ce cauchemar était si précis, les mots qu?il employait tellement graves que j?ai eu peur. «A son réveil, je l?ai interrogé immédiatement et il m?a tout avoué. Il savait à ce moment-là que la prescription allait tomber, il ne restait qu?un mois. Il m?a laissé le choix : «Dénonce-moi si tu veux, c?était un accident, je n?ai pas voulu la tuer. Je jouais à l?étrangler, et elle à se débattre. Elle aimait les jeux de ce genre, un peu stupides. Quand je me suis aperçu qu?elle était morte, je n?arrivais pas à y croire. Je me suis sauvé, j?ai quitté Londres et l?Angleterre deux jours plus tard. J?avais peur, même ici, de découvrir mon nom dans les journaux que tu lisais. Heureusement, elle n?avait mis que mes initiales dans un carnet. Personne ne m?a recherché. Mais je vis dans le remords depuis si longtemps que je suis soulagé que tu saches. Décide toi-même, je t?ai menti assez.» «J?ai réfléchi, messieurs, à l?inutilité de la justice si longtemps après. D?autre part, j?aime encore mon mari, même s?il me fait un peu peur à présent. Je ne sais pas si nous poursuivrons notre vie ensemble, mais j?ai attendu, pour vous écrire la vérité, que le délai soit passé et qu?il ne risque plus rien. Pardonnez-moi d?avoir en quelque sorte fait justice moi-même et de vous révéler une vérité. Si vous devez nous interroger, je vous supplie de le faire avec discrétion. Le seul mensonge auquel je tienne, c?est celui que je ferai à mes enfants, toute ma vie, par omission. Je ne veux pas qu?ils sachent.» Cette fois, le dossier était clos. Et nul ne saura jamais le nom de l?assassin de la jolie bibliothécaire qui jouait, avec son corps et un collier de perles fines, au jeu dangereux de la mort.