Résumé de la 17e partie n Neeve rentre enfin à la maison, encombrée des affaires d'Ethel Lambston. Denny Adler, le coursier du traiteur, qui livre habituellement ses repas à Neeve, est un repris de justice en liberté conditionnelle. «Denny, tu n'as pas besoin de venir au rapport lundi. J'ai un emploi du temps très chargé et je sais que je peux compter sur toi. Je te verrai la semaine prochaine. — Bien, monsieur.» Denny raccrocha. Une caricature de sourire balafra son visage aux pommettes saillantes. Il avait commis son premier cambriolage à l'âge de douze ans et passé la moitié de ses trente-sept ans en détention. Sa peau avait pris à jamais la pâleur grisâtre de la prison. Il parcourut la delicatessen du regard, les tables cucul la praline entourées de chaises métalliques, le comptoir de Formica blanc, le panneau où étaient affichées les spécialités, les habitués bien sapés, qui mastiquaient leur pain grillé ou leurs céréales en lisant le journal. Il rêvait à ce qu'il aimerait faire à cet endroit et à Mike Toohey, lorsqu'il fut interrompu par le gérant. «Hé, Adler, remue-toi. Les commandes vont pas se livrer toutes seules. — Oui, monsieur !» Compte les oui monsieur pendant qu'il est temps, pensa Denny, tout en prenant sa veste et le carton de sacs en papier. A son retour, le gérant était au téléphone. Il regarda Denny avec son air rébarbatif habituel. «Je t'ai déjà dit que je ne voulais pas d'appels personnels pendant les heures de service.» Il flanqua brusquement le récepteur dans la main de Denny. Le seul à l'appeler ici était Mike Toohey. Denny grommela son nom et entendit un «salut, Denny» étouffé. Il reconnut la voix sur-le-champ. Le Grand Charley Santino. Il y a dix ans, Denny avait partagé une cellule à Attica avec le Grand Charley et il avait fait un ou deux coups pour lui. Il savait que Charley entretenait d'importantes relations avec le milieu. Denny ignora le «grouille-toi» silencieux du gérant. Il n'y avait que deux personnes au comptoir. Les tables étaient vides. Il eut l'intuition soudaine que Charley allait lui proposer quelque chose d'intéressant. Il se tourna instinctivement vers le mur et mit ses mains en coupe autour du récepteur. «Ouais ? — Demain. Onze heures. Bryant Park derrière la bibliothèque. Une Chevrolet noire 84.» Denny ne s'aperçut pas qu'il souriait de toutes ses dents quand le déclic indiqua que la communication était terminée. Pendant ce week-end neigeux, Seamus Lambston se terra dans l'appartement familial, Soixante et onzième Rue, West End Avenue. Vendredi après-midi, il avait téléphoné au barman. «Je suis mal fichu. Demande à Matty de me remplacer jusqu'à lundi.» Il avait dormi comme une souche dans la nuit de vendredi, émotionnellement épuisé, mais il s'était réveillé samedi matin avec un sentiment d'extrême appréhension. Jeudi, Ruth était partie en voiture pour Boston et devait y rester jusqu'à dimanche. Jeannie, leur plus jeune fille, était étudiante en première année à l'université du Massachusetts. Le chèque que Seamus avait envoyé pour le deuxième semestre était retourné sans provision. Ruth avait fait un emprunt d'urgence à son bureau et avait filé en catastrophe à Boston avec le chèque de remplacement. Après l'appel affolé de Jeannie, ils avaient eu une dispute qui avait dû s'entendre à cinq blocs de chez eux. (à suivre...)