Résumé de la 26e partie n Neeve rencontre Tse-Tse, qui fait des ménages chez Ethel Lambston ; elle a la clé de l'appartement. Elles conviennent d'y aller ensemble, le lendemain. La boutique ne désemplit pas de la matinée. La réceptionniste essaya à plusieurs reprises le numéro de téléphone d'Ethel. Lorsqu'elle signala encore une fois «Pas de réponse» Neeve songea fugitivement que si Ethel avait enfin rencontré homme de sa vie, personne ne se réjouirait autant que son ex-mari qui, depuis vingt-deux ans, lui envoyait chaque mois sa pension alimentaire. Lundi était le jour de congé de Denny Adler. Il avait prévu de le passer à filer Neeve Kearny, mais le dimanche soir, il y eut un appel pour lui à la cabine téléphonique, dans le couloir de son meublé. Le gérant de la delicatessen annonça à Denny qu'il avait besoin de lui le lendemain. Le caissier avait été viré. «J'ai vérifié les livres de comptabilité et le salaud piquait dans la caisse. Je compte sur toi.» Denny jura en silence. Mais il serait stupide de refuser. «Je viendrai», maugréa-t-il. En raccrochant, il revit Neeve Kearny en pensée, le sourire qu'elle lui avait adressé la veille, quand il lui avait apporté son déjeuner, l'auréole que faisaient ses cheveux noirs autour de son visage, le gonflement de sa poitrine sous le luxueux pull-over. Le Grand Charley avait dit qu'elle se rendait Septième Avenue tous les lundis après-midi. Cela signifiait qu'il était inutile de chercher à la rattraper en sortant du boulot. C'était peut-être aussi bien. Il avait des plans pour lundi soir avec la serveuse du bar d'en face et n'avait pas envie de les annuler. Alors qu'il s'engageait dans le couloir humide, froid et empestant l'urine pour rejoindre sa chambre, il pensa : «Tu seras pas une autre enfant du lundi, Kearny.» L'enfant du lundi (une comptine anglaise) avait un joli minois. Mais pas après quelques semaines au cimetière. Neeve passait habituellement le lundi après-midi Septième Avenue. Elle aimait l'incroyable effervescence du quartier de la confection, les trottoirs bondés, les camions de livraison garés en double file dans les rues étroites, les garçons de courses qui manœuvraient avec agilité des portants de vêtements à travers la circulation, la sensation que tout le monde était pressé, qu'il n'y avait pas de temps à perdre. Elle avait commencé à venir ici avec Renata, alors qu'elle était à peine agée de huit ans. Passant outre les objections amusées de Myles, Renata avait pris un travail à mi-temps dans une boutique de vêtements de la Soixante-douzième Rue, à deux blocs de leur immeuble. Peu de temps après, la propriétaire devenue trop âgée lui avait confié la tâche d'acheter les vêtements pour la boutique. Neeve revoyait encore Renata secouer négativement la tête alors qu'un couturier trop insistant cherchait à la convaincre de prendre une tenue plutôt qu'une autre. «Quand une femme vêtue de cette robe s'assiéra, le corsage fera des plis dans le dos», disait Renata. Dès qu'une chose lui tenait à cœur, son accent italien réapparaissait. «Une femme devrait s'habiller, se regarder dans la glace, s'assurer qu'elle n'a pas une maille filée, un ourlet décousu, et ensuite oublier ce qu'elle porte sur elle. Ses vêtements doivent lui aller comme une seconde peau.» (à suivre...)