La sonnette d'alarme a été tirée, hier, lors des assises nationales des architectes sur la corruption qui mine ce secteur, avec des conséquences désastreuses sur le cadre de vie des Algériens. La spéculation, la surenchère et le gain facile… le Président de la République a mis, hier, le doigt sur les maux qui dénaturent l'acte de bâtir. «Nos formules de l'habitat sont très coûteuses et s'avèrent de moins en moins adaptées et, par conséquent, ouvrent la voie à toutes les dérives», a diagnostiqué, hier, Abdelaziz Bouteflika dans son allocution prononcée au prologue des assises nationales de l'architecture tenues à l'hôtel El-Aurassi, à Alger. Ne répondant guère donc aux attentes de l'Algérie en matière de politique urbanistique, ces formules doivent, selon le premier magistrat du pays, céder la place, obligatoirement, à une «architecture du XXIe siècle» quitte à «tout démolir et reprendre tout à zéro», même les «cités-dortoirs» érigées naguère en un temps record et qui sont devenues, par la suite, un véritable «nid pour la marginalisation et la frustration sociales». Bouteflika est allé jusqu'à asséner une cruelle vérité : «J'ai honte, j'ai honte, j'ai honte d'être en face de cette saleté dans nos villes. L'hygiène fait défaut, l'esthétique fait défaut et rien n'est agréable à voir à cause des citoyens peu ou pas du tout regardants sur leur cadre de vie», s'est-il lamenté en décrivant des espaces urbains sans cesse agressés par la déferlante machine de l'incurie, après l'avoir été longtemps par «les effets pervers de l'exode rural». Outre un arsenal juridique étoffé continuellement par des lois précises, «loin de toute forme d'improvisation», l'acte de bâtir recommande, comme le souligne encore le Président de la République, «l'implication directe de l'architecte comme un homme de la créativité et de l'inventivité». «Celui-ci aura un rôle fondamental pour assurer une rupture avec les réalisations et ouvrages sommaires du passé», a-t-il signifié, lui qui veut en finir, une fois pour toutes, avec «les aspects quantitatifs» des différentes politiques de l'urbanisme et de l'habitat, lesquelles avaient favorisé «la négligence d'autres aspects» et l'émergence de «la confusion des rôles qui a longtemps servi à masquer d'innombrables défaillances avec comme corollaire la dilapidation des richesses du pays». Dans ce registre précis et en guise de recommandations, le Président, qui ne trouve aucune objection à faire appel à la coopération étrangère (Turcs, Egyptiens ou Chinois ), a mis l'accent d'abord sur la qualité des études faites au préalable en donnant la priorité à la conception architecturale, avant d'entamer, par la suite, les phases de l'exécution et du suivi. En s'adressant aux professionnels qu'il a eu à rencontrer lors de sa brève visite des stands, en marge de la première journée des assises, le Président de la République a fait un clin d'œil aux générations futures. «Vous devriez bâtir des constructions qui durent pour nos enfants et pour plusieurs générations encore. Vous devriez construire pour un, voire deux siècles», a-t-il dit en rappelant, surtout, que «l'acte de bâtir doit impliquer en même temps la sécurité, l'esthétique et le bien-être».