Le Quotidien d'Oran, 17 janvier 2010 L'Association générale des entrepreneurs algériens (AGEA) tire la sonnette d'alarme et soutient que le programme quinquennal serait même compromis si des mesures ne sont pas prises pour «reconsidérer» la position des autorités envers les entreprises, du BTPH notamment. Le président de cette association, Mouloud Kheloufi, n'y est pas allé de main morte hier pour dénoncer ce qu'il qualifie de «mépris» affiché par certains responsables à l'égard des entreprises du secteur. S'exprimant au siège de l'AGEA à Bab Ezzouar, M. Kheloufi a déclaré, en réponse au ministre de l'Habitat qui a soutenu il y a quelque jours concernant la crise du ciment que les entrepreneurs sont des spéculateurs, que «la spéculation commence à l'intérieur des unités de production de ciment». «Si les entrepreneurs sont des spéculateurs alors je suis le chef des spéculateurs», s'est-il élevé, en conseillant «d'engager une simple enquête pour découvrir que le trafic se déroule dans les cimenteries». «Les cimenteries en question n'ont jamais délivré qu'une partie de la quantité de ciment demandée par les entrepreneurs, malgré leur plan de charge», affirme le président de l'AGEA, qui soutient que «l'autre partie est revendue aux revendeurs et aux véritables spéculateurs». Le conférencier affirme même que des quantités du ciment importées par les autorités pour faire face à la crise sont revendues actuellement sur le marché noir. Les entrepreneurs sont obligés de se rabattre sur le marché noir pour maintenir en activité leurs chantiers, ajoute le responsable de l'AGEA qui révèle qu'entre 200 et 250 entreprises ont fermé l'année dernière à cause de problèmes d'approvisionnement en matériaux de construction et d'autres problèmes bureaucratiques. 34 entrepreneurs sont décédés foudroyés par une crise cardiaque en 2009 à cause de tous ces problèmes, affirme Kheloufi qui dénonce l'absence de dialogue avec les autorités en ce qui concerne le secteur du BTPH. Mouloud Kheloufi reproche également à certains membres du gouvernement le fait de se réunir avec une partie des chefs d'entreprises alors que le conseil national consultatif (CNC) qui regroupe responsables d'institutions de l'Etat et représentants la sphère économique, a été mis en place pour justement assurer ce rôle. «A quoi sert le CNC s'il n'est pas associé dans le dialogue», s'interroge le président de l'AGEA qui appelle à une «réhabilitation» de cet organisme mis en place sur décision du chef de l'Etat. Le conférencier a fait état hier d'un «climat malsain» qui prévaut au sein du secteur à cause de problèmes qui pourraient, dit-il, être évités si un «dialogue franc et sincère» est instauré. Le problème des cahiers de charges, les marchés publics, la qualification des entreprises, les créances détenus par les entreprises auprès de l'administration étaient les problèmes énumérés hier par le responsable de l'AGEA. Ce dernier a affirmé qu'il reste encore quelque 27 milliards de DA de créances détenues par l'administration, ce qui affecte lourdement la trésorerie de ces entreprises. «Avant de parler de la qualité du bâti, il faut d'abord mettre en place les outils de travail», a déclaré Kheloufi qui craint le pire pour le secteur lors du prochain plan quinquennal. Les avis d'appel d'offres qui seront lancés ne trouveront pas d'entreprises réalisatrices et les pouvoirs publics ne pourront pas recourir systématiquement aux étrangers, affirme le conférencier qui appelle à faire un état des lieux lors des 2èmes assises du BTPH qui seront organisées par l'AGEA dans la ville d'Oran le mois de juin prochain. «Nous voulons être consultés dans les décisions qui nous concernent», poursuit Kheloufi qui dit que son organisation a des propositions concrètes qu'elle présentera lors de ces assises qui seront probablement parrainées par le président de la République. L'inévitable LFC 2009 La loi de fiances complémentaire continue de susciter des appréhensions. Les responsables de l'AGEA ont affirmé, hier, que le crédit documentaire (Credoc) est à l'origine de la faillite d'au moins 200 entreprises depuis son entrée en vigueur. Les importations ont baissé de plus 60% à cause de cette mesure, affirme le secrétaire général de l'AGEA, Belkacem Mezine. Les importateurs de matières premières sont dans l'expectative et sont obligés d'attendre plusieurs mois pour recevoir une marchandise payée d'avance et qui n'est pas vérifiable, avec le risque d'engendrer d'autres retards en cas de non-conformité, ajoute M. Mezine. Par ailleurs, concernant la Zone arabe de libre-échange (ZALE), le président de l'AGEA dira que les entreprises algériennes ont été jetées en pâture et n'ont pas été consultées ni avant, ni après l'adhésion à cette ZALE. «La protection de la production nationale passe par la concertation des entreprises», conclut le président de l'AGEA.