Aperçu n Les premiers rayons de soleil commencent à peine à pénétrer l'établissement, en cette journée printanière, lorsque les élèves quittent les salles de classe pour la traditionnelle récréation de 10 heures. Par petits groupes, ils se dirigent, tout joyeux, vers la cour. Le calme des lieux cède alors progressivement la place au «bourdonnement» des petits bambins : les uns discutent à n'en pas finir de tout et de rien, les autres fredonnent des airs tout doux, tout beaux, alors que la plupart s'adonnent à des jeux «physiques». Rien n'indique qu'ils souffrent d'un handicap quelconque. Et pourtant, ils sont tous aveugles ou mal-voyants ! C'est qu'on est à l'école des jeunes aveugles d'El-Achour qui accueille, depuis 1967, les enfants atteints de cécité totale ou partielle. Ils y suivent leur scolarité de la première année primaire à la dernière année du cycle moyen suivant des méthodes adaptées. «L'alphabet braille est la première chose qu'on leur apprend ici», indique le sympathique conseiller pédagogique de l'école, Allaoua Djenane, lui-même non-voyant. Et de préciser : «Les cours qu'on dispense sont les mêmes que ceux des écoles normales avec quelques adaptations dans la forme.» Actuellement, 174 élèves, dont 96 garçons et 78 filles, y sont scolarisés, la plupart originaires d'Alger, de Blida, de Tipaza, de Bouira et de Médéa. «Quand ils arrivent, certains se renferment sur eux-mêmes, mais avec le temps, ils finissent par se libérer et retrouver leurs repères au point de refuser de quitter les lieux, même pendant les vacances scolaires», affirme la psychologue clinicienne de l'établissement, Mme Bouchra Kechroud, tout en citant le cas d'une fille qui avait du mal à marcher à son arrivée à l'école, «mais qui, une fois prise en charge, a retrouvé toutes ses facultés». Selon notre interlocutrice, les élèves non-voyants suivent une scolarité tout à fait normale : «Ils sont soumis aux mêmes examens que les élèves des autres écoles, ils font du dessein, de la musique et…du sport». Comme dans toutes les écoles aussi, les résultats scolaires varient d'un élève à un autre. «Il y a de bons et de mauvais élèves. Néanmoins, le taux de déperdition scolaire est moins important ici que dans l'école traditionnelle, car on a moins d'élèves et plus d'encadrement», note M. Djenane. Et à Mme Kechroud de souligner : «Ce sont des élèves comme les autres, ils ne sont ni surdoués ni attardés.» «Les problèmes auxquels ils sont confrontés sont d'ordre relationnel surtout, ils viennent m'en parler souvent , certes, certains ont du mal à vivre avec leur handicap, mais la majorité ne s'en plaignent pas du tout», poursuit-elle. Les parents peuvent jouer un rôle primordial dans l'insertion de leurs enfants aveugles en étant à leur écoute. Malheureusement, cela est loin d'être une règle dans notre société. «S'ils ne sont pas surprotégés, les enfants aveugles sont abandonnés à leur sort», affirme en guise de conclusion Rachid Ikhlef, enseignant au niveau de l'école.