Comme dans un stade, un tribunal est le lieu où se croisent forcément la douleur et la joie. La douleur dévorante et rongeante de la condamnation et la joie indescriptible de la relaxe, de cette liberté retrouvée in extremis après un réel risque de confiscation. Hier à Blida, ce fut le cas. Les images les plus poignantes provenaient par intermittence, à chaque fois que Mme Brahimi prononçait l'acquittement. C'est Abdelwahab Dallal qui ouvre le bal en premier. Dès que la juge prononce le mot «bara'a» (acquittement) à l'adresse de l'accusé, toute la salle est secouée par un tonnerre d'applaudissements, de cris stridents et d'interminables youyous. Invité à regagner la porte de sortie, celle de la liberté, Abdelouhab tombe en pleurs dans les bras d'un de ses parents. Les yeux rouges comme s'il n'avait pas dormi depuis une éternité,celui qui venait de recouvrer sa liberté est resté figé inconsolable. Il ne croyait sans doute pas sortir de l'enfer dans lequel beaucoup d'autres se sont fait brûler. «Al hamdoulilah» entonnait-il en marchant à pas mesurés au milieu de la foule, aidé par une main tendue qui venait l'accueillir. D'autres personnes mises en liberté ont carrément éclaté en sanglots, peut-être pour la première fois de leur vie. Emotifs à l'extrême dans une telle ambiance insoutenable, elles n'avaient que des larmes pour exprimer leurs sentiments. Bourayou et Ouandjeli, touchés au plus profond de leur être, en faisaient partie. Ils ont tout de suite été pris en triomphe par des collègues venus la matinée pour les soutenir. Mais la plus flamboyante messe destinée aux relaxés fut incontestablement celle faite aux travailleurs de la mutuelle des P et T, en l'occurrence Mohamed Tchoulak et Ahmed Berber. Ces deux derniers ont été salués comme de véritables héros dès leur mise en liberté. Leurs amis ont transformé le tribunal en salle des fêtes…