Suite n Cette seconde histoire de reptile a, pour cadre, le Sahara. Et elle est beaucoup plus ancienne que la première. Ceux qui nous ont raconté cette histoire disent «zman, zman», «il y a longtemps si longtemps», mais sans donner de précision : on sait seulement qu'à l'époque des faits, il n'y avait pas encore de voiture et que pour se déplacer, on recourait à des bêtes de somme. Le personnage principal — appelons-le Mohamed — habitait une ville du sud mais il était constamment en déplacement, parce qu'il était colporteur. Il allait, poussant un dromadaire chargé de bibelots utilitaires et il se rendait de ksar en ksar, vendant sa marchandise ou la troquant contre des produits locaux, notamment des dattes et des peaux. Cette année-là, Mohamed s'est déplacé au pays des Touaregs, dans le lointain Tassili. Habituellement, il se déplace seul, mais cette foi-ci, il a emmené avec lui, son jeune fils, Mahmoud. C'est un garçon d'une douzaine d'années et Mohamed veut l'entraîner au métier du colportage. Or, pour apprendre le métier, rien ne vaut l'expérience. C'est le premier long voyage de Mahmoud, et, il est excité, à l'idée d'aller aussi loin et surtout de voir les légendaires Touaregs. — tu en verras certainement à Djanet, dit Mohamed, beaucoup de nomades passent par là ! Mais pour arriver jusqu'à Djanet, il faut parcourir des centaines de kilomètres, traverser le désert, affronter des dangers. La mère du petit n'était pas tout à fait d'accord pour que son fils fasse un aussi long voyage, mais Mohamed, lui a expliqué que si son fils veut le remplacer un jour, il doit s'entraîner aux longs périples. — Il y a de grands dangers et ce n'est qu'un enfant ! — Le danger fait partie de l'apprentissage. Le père et le fils sont donc partis. Ils ont marché longtemps, dans le désert, faisant des hâtes aux oasis ; mais l'objectif n'est pas ces petits ksars éparpillés, mais Djanet, important centre commercial du Tassili N'ajjer. Les deux voyageurs s'en approchent, après une marche de plusieurs jours. A l'époque déjà, Djanet était composée de trois ksars, Adjahil, El-Mihane et Azellouaz, situés de part et d'autre de l'oued Edjéréou dont le nom signifie en langue targuie «océan, grand fleuve». Il prend sa source au Tassili et coule vers le sud, jusqu'à l'erg Admer. Il est connu, également, sous les noms de Eferi, In Débirène et, dans la région de Djanet, oued Djanet. Djanet, qui se trouve aux confluents d'un réseau hydrographique très dense, formé d'oueds, de sources et d'une nappe phréatique importante, est entourée de plusieurs dizaines de milliers de palmiers qui en font un petit paradis de verdure au milieu du désert. Mohamed et Mahmoud ne sont plus qu'à deux heures de marche du ksar, mais, comme ils sont épuisés, ils décident de passer la nuit à la belle étoile. Ils reprendront des forces et, le matin, ils entreront dans la ville pour le grand marché. (à suivre...)