Résumé de la 3e partie n Cabilaud a, une fois encore, exaucé le vœu d'Isabelle. Elle est devenue impératrice. Mais jusqu'à quand ? Eh bien, lui dit Pierre, j'espère que te voilà au comble de tes vœux ; il n'y a jamais eu de sort comparable au tien. — Nous verrons cela demain, répondit-elle. Après un festin magnifique, elle alla se coucher ; mais elle ne put dormir ; elle était tourmentée à l'idée qu'il y avait peut-être quelque chose de plus désirable encore que d'être empereur. Le matin, lorsqu'elle se leva, elle vit que le ciel était brumeux. «Tiens, se dit-elle, je voudrais bien voir le soleil ; les nuages sombres m'attristent. Oui, mais, pour faire lever le soleil, il faudrait être le bon Dieu. C'est cela, je veux être aussi puissante que le bon Dieu.» Toute ravie de son idée, elle s'écria : — Pierre, habille-toi sur-le-champ, et va dire à ce brave cabillaud que je désire avoir la toute-puissance sur l'univers, comme le bon Dieu ; il ne peut pas te refuser cela. Le brave pêcheur fut tellement saisi d'effroi, en entendant ces paroles impies, qu'il dut se tenir à un meuble pour ne pas tomber à la renverse. — Mais, ma femme, dit-il, tu es tout à fait folle. Comment, il ne te suffit pas de régner sur un immense et riche empire ? — Non, dit-elle, cela me vexe, de ne pas pouvoir faire se lever ou se coucher le soleil, la lune et les astres. Il me faut pouvoir leur commander comme le bon Dieu. — Mais enfin, cela dépasse le pouvoir de ce bon cabillaud ; il se fâchera à la fin, si je viens l'importuner avec une demande aussi insensée. — Un empereur n'admet pas d'observations, répliqua-t-elle avec colère ; fais ce que je t'ordonne, et cela sur-le-champ. Le brave Pierre, le cœur tout en émoi, se mit en route. Il s'était levé une affreuse tempête, qui courbait les arbres les plus forts des forêts et faisait trembler les rochers ; au milieu du tonnerre et des éclairs, le pêcheur atteignit avec peine la plage. Les vagues de la mer étaient hautes comme des tours, et se poussaient les unes les autres dans un épouvantable fracas. — Cabillaud, cher cabillaud, s'écria Pierre, ma femme, mon Isabelle, malgré moi, elle veut encore une dernière chose. — Qu'est-ce donc ? dit le poisson, qui apparut aussitôt. — J'ose à peine le dire, répondit Pierre ; elle veut être toute-puissante comme le bon Dieu. — Retourne chez toi, dit le cabillaud, et tu la trouveras dans la pauvre cabane d'où je l'avais tirée. Et, en effet, palais et splendeurs avaient disparu ; l'insatiable Isabelle, vêtue de haillons, se tenait sur un escabeau dans son ancienne misérable hutte. Pierre en prit vite son parti, et retourna à ses filets ; mais jamais plus sa femme n'eut un moment de bonheur.