Expression n Le Palais de la culture abrite, depuis le 6 septembre, une belle exposition. Celle-ci qui présente et l'ancienne et la nouvelle génération de plasticiens, offre — aux professionnels et aux amateurs — une description certes d'ensemble mais significative de l'art moderne et contemporain arabe. Elle nous renseigne sur un exercice artistique activement en vigueur, mais méconnu quasiment du public. L'exposition se révèle effectivement une découverte. Elle se révèle également une aventure artistique : elle retrace les expressions et les expériences des trois régions du monde arabe (le Maghreb, le Machreq et les pays du Golfe). Même la diaspora, ces artistes vivants à l'étranger, en exil pour diverses raisons, y est présentée). Ainsi, l'exposition rend si bien compte de toutes les phases de l'art contemporain arabe, à savoir de sa naissance à nos jours, des pionniers aux nouveaux créateurs. Elle rend compte aussi des grandes tendances représentatives de cet art. L'exposition comprend 70 œuvres, soit 70 artistes (hommes et femmes). Autant de styles, de techniques que de thématiques, d'imaginaires que de sensibilité sont montrés au public. Autant de richesses que de diversité qui, là, forment l'art contemporain arabe. En examinant, en effet, de plus près chacune des créations, qu'elles soient peintures ou sculptures, gravures ou designs, on s'aperçoit d'emblée que, techniquement, formellement parlant, l'art contemporain arabe s'est érigé sur le modèle occidental (expressionnisme, abstrait…), s'inscrivant alors dans la modernité et l'universalité. Mais sur le plan thématique, c'est la tradition, voire l'identité culturelle arabe que les plasticiens s'emploient à dire et à représenter : on y retrouve des référants témoignant d'une inspiration du patrimoine artistique ancien (artisanat, architecture traditionnelle, signes, calligraphie…), ou encore du legs arabo-musulman comme les arts mésopotamien, pharaonique, phénicien, amazigh… Farid Belkahia (Maroc) se distingue par une audace créative en s'employant dans ses créations à exprimer le souci de la recherche d'une expression plastique de conception moderne, mais d'essence patrimoniale. Il se penche ainsi sur l'art populaire berbère : à la place de la toile, il utilise la peau d'agneau comme support, et sur laquelle, il compose des signes et symboles traditionnels. Marwan (Syrie) œuvre dans l'abstrait : il projette son visage sur ses toiles ; celui-ci y apparaît étrangement, fondu, flottant. On y voit une tête – celle-ci constitue désormais l'objet de son travail et de création – qui, par endroits, est déformée et, par d'autres, porteuse d'un désarroi sans issue. Mouna Saoudi (Jordanie) s'intéresse, elle, dans son travail de création, à l'espace des cités arabes : dans et au-delà de ce fouillis urbain qui produit un jeu de volumes, donnant ainsi à la ville l'apparence d'une immense sculpture, elle pose son regard sur les relations humaines qui s'y déroulent. Nada Akl (Liban) peint des scènes à connotations singulièrement surréalistes : son univers créatif est émotif. Il se révèle un lieu où souvenirs d'enfance, espaces intimes et êtres aimés ou admirés cumulent et se mêlent de manière à créer une réalité onirique laissant défiler portraits et paysages. Rachid Diab peint des silhouettes de personnages légères, flottantes, réduites à leurs lignes essentielles, de manière quasi minimaliste. Dhia Azzawi (Irak) s'emploie dans sa peinture à divers supports (toiles, céramique, lithographie…) et à utiliser plusieurs référants : éléments inspirés du patrimoine mésopotamien, de la civilisation arabo-musulmane et de l'art moderne universel, le tout y est habilement et joliment agencé à travers une reformulation du cubisme. Ainsi, l'art contemporain arabe est pensé de façon imaginative à partir de procédés de création et de techniques de réalisation diverses. Il prône les valeurs d'humanisme et de liberté : liberté du dessin, liberté de la forme, liberté du matériau et aussi des thèmes.