Les jeunes harragas qui s'aventurent à la recherche du paradis perdu, ne mesurent pas tous les risques qu'ils prennent : tomber entre les mains des réseaux de prostitution, de drogue ou se retrouver enrôlés dans des guerres qui ne les concernent pas. Le dossier des harragas semble préoccuper au plus haut point les responsables du secteur des affaires religieuses qui ne laissent passer aucune opportunité pour évoquer le phénomène et chercher les meilleures voies pour amener les jeunes à cesser de risquer leur vie en mer. Hier, c'était au tour du directeur de l'orientation religieuse au sein du département de Bouabdallah Ghlamallah de tirer la sonnette d'alarme sur les dangers qu'encourent les jeunes harragas, même ceux d'entre eux qui échappent aux risques de noyade et réussissent à atteindre les côtes sud de l'Europe. Selon Mohamed Aïssa, qui s'exprimait au cours d'une journée d'étude organisée par la direction des affaires religieuses et des waqfs de la wilaya d'Alger autour du «Rôle de la mosquée dans le traitement des comportements négatifs des jeunes» à Dar El-Imam de Mohammadia (Alger), de nombreux jeunes Algériens qui choisissent de tenter la traversée de la Méditerranée sont incités à cette entreprise périlleuse par des «réseaux internationaux» avec le dessein inavoué de les exploiter par la suite dans des réseaux de prostitution et de trafic de drogue ou de les acheminer carrément dans des camps d'entraînement terroristes. Une grande partie des jeunes harragas risquent ainsi de se retrouver impliqués, malgré eux, dans des «guerres qui ne les concernent pas» que ce soit au Liban, en Somalie ou en Irak. Les mêmes intentions animent, selon le même responsable, ceux qui se cachent derrière les campagnes d'évangélisation qui ciblent régulièrement les élèves, notamment ceux des écoles primaires. D'où la nécessité, selon lui, de tout mettre en œuvre pour que la mosquée puisse jouer pleinement son rôle dans la prévention de ce genre de «conduite négative étrangère à la société algérienne». «Pour relever ce défi, estime M. Aïssa, l'imam devra se rapprocher davantage de la société et faire de la mosquée une cellule d'écoute en faveur des jeunes, appelant les imams à se réunir chaque mois afin de tirer profit des expériences des autres secteurs en matière de lutte contre ces comportements négatifs.» Tout en appelant à la mise en œuvre d'une politique nationale pour préserver la jeunesse, l'orateur a indiqué que le ministère des Affaires religieuses accorde un intérêt particulier à la formation des cadres de la mosquée faisant obligation pour les candidats aux postes d'imam enseignant et imam prêcheur d'être titulaire du baccalauréat et d'une licence. Abondant dans le même sens, le président du Conseil scientifique de la wilaya d'Alger a invité les imams à adopter un langage qui soit proche de celui des jeunes en vue de mieux faire passer les messages au moment où le directeur général de l'administration pénitentiaire au niveau du ministère de la Justice a mis en évidence le rôle de la religion dans l'orientation des détenus et délinquants. Il est utile de rappeler que les services du département de Ghlamallah se sont, à plusieurs reprises, penchés sur la question de l'émigration clandestine. Il y a quelques mois, un projet de fetwa assimilant la harga à une tentative de suicide a même été évoqué.