Explication n Le gouvernement est catégorique : le gel du processus de privatisation du CPA ne cache aucune arrière-pensée politique. L'impact de la crise des subprimes sur les repreneurs potentiels en est la seule raison. «Je fais mon mea culpa et je présente mes excuses.» C'est en ces termes que la ministre déléguée chargée de la Réforme bancaire a reconnu hier la «maladresse» commise deux jours plus tôt en rendant public un communiqué laconique annonçant la suspension du processus de privatisation du CPA. «Mon calendrier était chargé et, de toute façon, j'avais prévu un point de presse pour évoquer la question sous tous ses aspects», se défend-elle par ailleurs. Mme Fatiha Mentouri s'exprimait, justement, au cours d'une conférence de presse tenue au siège de son département et consacrée exclusivement à la question de l'heure : le report de la première expérience de privatisation d'une banque publique. Flanquée du P-DG du CPA et du responsable du projet de privatisation de la banque, la ministre anticipera les questions des représentants de la presse en rappelant d'emblée que tout le processus a été mené dans la transparence du début jusqu'à sa suspension. Après un bref rappel des différentes étapes ayant marqué le processus, elle en vient à l'essentiel : les motifs ayant conduit le gouvernement à geler l'opération deux jours avant la date limite de remise des offres. Selon elle, une telle décision était inévitable à cause des incidences de la crise des prêts immobiliers à risque dite «crise des subprimes» dans le monde, et particulièrement aux Etats-Unis. «Cette crise a eu un impact sur l'engagement des banques intéressées par la reprise du capital du CPA», explique-t-elle, ajoutant que «les grands groupes financiers qui avaient minimisé l'ampleur de la crise à son début, affichent aujourd'hui des résultats pas très encourageants». Elle cite l'exemple de la plus grande banque des Etats-Unis, Citibank, «la plus touchée par la crise» et qui a dû «revoir tout son système de management». «Elle se retrouve d'ailleurs, en ce moment, sans P-DG», ajoute la ministre. Or, il se trouve que ce groupe figurait en pole position parmi les potentiels repreneurs du CPA. La situation dans laquelle il se retrouve a amené le groupe bancaire américain à ne pas prendre de décisions stratégiques l'engageant à long terme, ce qui a conduit ses dirigeants à annoncer, mercredi, son retrait momentané du processus de privatisation du CPA. «En mai 2007 déjà, nous avons enregistré le retrait de la banque espagnole Santander de la course», rappelle Mme Mentouri qui croit savoir que Santander avait fait défection après avoir opté pour une vente-fusion avec une grande banque européenne. «C'est un changement de stratégie que nous respectons», se contente-t-elle de dire en guise de commentaire. Le 23 novembre, révèle la ministre, soit la veille de la décision de la suspension du processus, c'est le groupe français Crédit Agricole qui a émis le souhait de voir la date limite de la remise des offres reportée, préférant «prendre du recul pour mieux évaluer l'impact de la crise et revenir plus tard». Samedi dernier donc, il ne restait plus que trois banques en lice, toutes françaises : BNP Paribas, Natixis-Banque Populaire et Société Générale. Le jeu de la concurrence étant sérieusement menacé, il devient clair que l'ouverture du capital du CPA n'aurait pas rapporté sa valeur réelle. «L'Etat algérien a le devoir de veiller sur les intérêts de ses institutions financières et ne cédera pas le CPA à un prix qui ne soit pas celui du marché», dira-t-elle en marge de la conférence. En attendant, donc, «la réunion de conditions meilleures afin de permettre l'élargissement de l'éventail des repreneurs potentiels», le gouvernement a pris la décision de geler le processus de l'ouverture du capital de la banque. De plus, argumente encore la ministre, «la situation est caractérisée en ce moment par un manque de visibilité» d'où la nécessité d'agir avec prudence. «On ne prend pas la mer en pleine tempête», conclut-elle.