Chiffres n Ils sont 735 enfants à avoir subi des violences sexuelles depuis le début de l'année sur un total de près de 1 700 auxquels ont été infligés divers sévices, selon un rapport de la police. La violence et la maltraitance sur les enfants sont une source de souffrance et de désespoir. Et il n'est pas étonnant de voir, comme le confirment de nombreux spécialistes, que le taux de suicide chez les jeunes victimes d'agressions sexuelles est très élevé. La pédophilie est avant tout un rapport de force qui s'exerce exclusivement sur les catégories les plus vulnérables qui sont les enfants et parfois des handicapés. La plupart des enfants agressés sont victimes d'un membre de leur entourage, ce qui explique en partie le silence qui entoure ce phénomène. C'est déjà difficile de dénoncer un père, un oncle, un ami... Et cela est pire si l'enfant sait que son agresseur peut se retourner contre lui, une fois dénoncé. En effet, l'abus sexuel est suivi d'homicide volontaire dans la majorité des cas, car l'auteur est identifié, affirme Mme Messaoudène, commissaire principal et chef de bureau de la Protection de l'enfance et délinquance juvénile, pour qui la pédophilie est un autre fléau qui vient confirmer la dégradation des mœurs et la crise morale dont souffre notre société. Ainsi, bien que condamnée par la morale et la justice, la conspiration du silence autour de cette pratique fait de cette condamnation un vœu pieux. Et les premiers protégés par ce mutisme sont, évidemment, les agresseurs et ce, quelles que soient les raisons invoquées pour justifier cette attitude. Cette passivité s'apparente à une forme d'acceptation de la violence sexuelle devenue presque inévitable, commente le réseau Wassila pour qui l'ordre social a, d'une certaine manière, favorisé l'admission de cette violence. «Ce mal est devenu comme inévitable car les catégories touchées sont les plus vulnérables et donc socialement destinées aux abus et à la discrimination», explique-t-il. Certaines victimes, outre les pressions et les intimidations qu'elles continuent de subir de leur agresseur, se trouvent souvent livrées à elles-mêmes hantées par un sentiment de peur, de honte et de culpabilité. Pour franchir le premier pas et dénoncer leurs bourreaux, ces enfants ont surtout besoin d'être accompagnés et rassurés pour oser parler et affronter, dans la durée, les affres de l'enquête judiciaire et l'épreuve du procès. Encore faudrait-il que les parents aient le courage d'engager une action judiciaire contre l'agresseur. Lors de leur enquête sur les agressions sexuelles sur mineurs, le réseau Wassila a conclu qu'en effet, «les proches de la victime, abandonnés à leur détresse et à leur solitude, guettent aussi et surtout les manifestations de solidarité. Ils réclament à la société la reconnaissance que leurs enfants ont été lésés dans leur droit, qu'ils sont innocents de ce qu'ils ont subi. En fait, la reconnaissance de leur statut de victime et non pas de coupable.»