Fuite La multiplication de ces «agressions» aurait décidé le chef de famille à demander sa mutation dans une autre caserne. Les jeunes filles avaient rapporté à l?époque que la vieille locataire était même apparue à elles sous forme humaine. Pour l?une d?entre elles, Catherine s?était manifestée la nuit surtout, pendant près d?un mois. Vêtue de blanc et les cheveux défaits, le spectre se tenait à heure régulière à son chevet, l?observant seulement. Mais elle avait été incapable, à chaque fois, de bouger de son lit, de hurler à cette apparition. Sa s?ur cadette avait, pour sa part, fait état de la présence d?une ombre furtive qui l?accompagnait au moindre de ses déplacements dans la maisonnée. L?adolescente ainsi harcelée en serait devenue comme folle. On dit qu?un jour l?ombre l?aurait même frappée alors qu?elle se trouvait dans la salle de bain. La multiplication de ces «agressions» aurait décidé le chef de famille à demander sa mutation dans une autre caserne, loin de Mechrouha et de Catherine. Zahia, de son côté, a connu une certaine tranquillité dans son logement durant les quatre premières années de leur séjour dans cette région montagneuse. L?air pur de Mechrouha et surtout le calme qui y règne à longueur d?année l?ont changée du tumulte de son Constantine natal. Elle se réjouissait de tant de bonheur simple qu?elle partageait avec ses enfants jusqu?au jour où le spectre de Catherine commença à se manifester encore. Ce fut d?abord comme une sorte de fluide invisible qui venait et s?en allait à travers l?appartement, au niveau des chambres qui donnent sur le jardin en friche et dans les toilettes. Zahia sentait cette présence diffuse comme une menace latente. Elle en avait la chair de poule et ses cheveux se hérissaient à chacune de ces vibrations furtives. Craignant que son époux ne la prenne pas au sérieux, elle évita de lui en faire part, préférant se convaincre qu?il ne s?agissait là que d?une crise d?angoisse passagère que les racontars de sa voisine avaient exacerbée. Zahia est une femme qui a fait des études et elle s?efforçait, en ces moments, de rester la plus rationnelle possible. Avec son éducation et à son âge, on ne croit plus aux fantômes... Pourtant, les choses allèrent en s?aggravant en se concrétisant. L?esprit, ou ce qui s?y apparente, devenait de plus en plus hostile, de plus en plus menaçant. Les portes et les fenêtres s?ouvraient et se refermaient en claquant violemment, comme soufflées par un vent violent, le soir surtout. Les objets étaient précipités contre les cloisons ou sur le sol sans que quiconque s?en approche. (à suivre...)